Le diagnostic du cancer colorectal

Quels sont les symptômes ?

En dehors d’une perte de poids et d’une fatigue générale, les symptômes les plus fréquents des tumeurs primitives sont les troubles du transit (constipation, diarrhées, etc.). Vu leur fréquence et leur banalité, ils ne sont pas spécifiques. C’est donc un changement du transit habituel qui doit alerter. Un vieil adage garde toute sa valeur : « Tout trouble du transit récent passé la cinquantaine doit être exploré ». Tendance à la diarrhée ou à la constipation, alternance des deux, ballonnement inexpliqué sont des signes qui doivent faire consulter à cet âge.

Les saignements digestifs sont assez souvent révélateurs ; ils doivent inquiéter et inciter à consulter. Il s’agit de sang rouge quand le saignement est abondant ou survient dans la partie basse de l’intestin ou de sang plus noir lorsqu’il provient de la partie haute de l’intestin. Ces saignements sont souvent mêlés aux selles. L’erreur serait de les attribuer à une cause banale, comme les hémorroïdes, et de ne pas faire réaliser une coloscopie indispensable. Un saignement chronique non visible peut par ailleurs provoquer une baisse des globules rouges, appelée anémie. La découverte d’une anémie, à l’occasion d’une prise de sang réalisée pour une quelconque raison, peut aussi être révélatrice d’un cancer qui doit être exploré par coloscopie et fibroscopie gastrique en l’absence de cause évidente.

Les douleurs abdominales qui font le tour du ventre (coliques) constituent aussi une alerte et doivent pousser à consulter. Une région de l’abdomen peut parfois être plus sensible. Ces troubles du transit sont parfois accompagnés d’un ballonnement, appelé météorisme, de gaz ou de gargouillements.

Des douleurs violentes et une envie d’aller à la selle permanente, appelé ténesme, ainsi que des émissions de glaire ou de sang, exacerbées ou provoquées par le passage des selles, traduisent un « syndrome rectal » souvent causé par le cancer du rectum surtout lorsqu’il atteint sa partie basse.

À l’opposé, le cancer du côlon droit ou le cancer du cæcum, peuvent être longtemps sans aucun signe apparent et se révéler par une masse (grosseur) au niveau de la partie droite de l’abdomen, une anémie, des douleurs, de la fièvre qui peuvent faire penser à une appendicite.

Si les symptômes précédemment décrits sont peu marqués ou ont été ignorés, l’existence d’un cancer peut être révélée par l’une des complications suivantes :

  • l’occlusion intestinale, qui se caractérise par un arrêt des matières et des gaz, des douleurs violentes, un ventre très ballonné accompagné tardivement de vomissements ;
  • la perforation intestinale, qui ajoute à l’occlusion un ventre très dur et l’apparition rapide d’une fièvre provoquée par l’irritation du péritoine (péritonite).

Dans 10 à 20 % des cas, les cancers colorectaux sont révélés par la découverte de métastases à distance, en particulier au niveau du foie. Cependant, dans la majorité des cas, ils sont découverts par des symptomes liés à la présence d’une tumeur du côlon ou du rectum.

Quels sont les différents moyens de diagnostic ?

Le diagnostic de certitude, indispensable, repose sur la mise en évidence de cellules tumorales à l’examen anatomopathologique. C’est dire l’importance de la coloscopie qui non seulement visualise le cancer, mais en plus permet un prélèvement de la tumeur. Ce prélèvement est appelé biopsie.

La coloscopie est un examen, pratiqué par le gastro-entérologue, qui explore la totalité du côlon et du rectum à l’aide d’un appareil souple constitué de fibres optiques et d’instruments permettant des prélèvements et même l’exérèse (ou l’ablation) de polypes. Cet examen est le plus souvent fait sous anesthésie légère, ce qui le rend indolore. Par contre, il nécessite une consultation d’anesthésie auprès d’un anesthésiste, une prise de sang pour vérifier la coagulation sanguine et surtout une préparation de l’intestin qui n’est pas toujours très agréable. En effet, cette préparation consiste à laver l’intestin par l’absorption d’une grande quantité de liquide laxatif. Une bonne préparation est indispensable, il faut la faire consciencieusement. La coloscopie ne nécessite pas d’hospitalisation dans la plupart des cas, elle dure en moyenne une demi-heure et, après quelques heures de surveillance, il est possible de rentrer chez soi. Il vaut mieux se faire accompagner si l’examen a été fait sous anesthésie générale.

Parfois il n’y a pas d’autre moyen de faire le diagnostic en dehors d’une opération. Et celle-ci peut être nécessaire si le cancer est à l’origine de complications survenant avant que la coloscopie n’ait pu être réalisée.

Le coloscanner (ou coloscopie virtuelle par scanner), qui évite d’introduire un instrument dans l’intestin, est une alternative en cas de contre-indication à la coloscopie. Il permet de visualiser un cancer ou un polype, mais ne permet pas de faire des prélèvements.

Elle nécessite souvent une préparation de l’intestin. Par contre, elle évite les exceptionnelles complications de la coloscopie, comme la perforation intestinale qui survient surtout sur les côlons fragilisés par l’inflammation du côlon (ou colite) ou les diverticules (petites cavités en cul-de-sac communiquant avec l’intérieur de l’intestin).

Le lavement aux produits de contraste, lavement opacifiant l’intérieur de l’intestin et permettant ainsi de visualiser la muqueuse intestinale à la radiographie, est un examen moins performant que la coloscopie virtuelle car il ne permet pas de dépister les petites anomalies. Cela dit, il peut être utile en cas d’occlusion, combiné le plus souvent avec un scanner.

Les marqueurs tumoraux sanguins qui sont des substances présentes dans le sang susceptibles de témoigner de l’existence de certains cancers (en particulier l’antigène carcinoembryonnaire ou ACE) n’ont pas d’intérêt diagnostique. Ils sont d’ailleurs le plus souvent normaux lorsque le cancer n’est pas métastasé.

Quelle est l’étendue du cancer ?

Cette question est très importante. De l’étendue du cancer dépendent le pronostic et le traitement.

L’étendue du cancer est connue après le bilan d’extension qui recherche la présence de métastases ainsi que par l’examen anatomopathologique qui consiste à analyser au microscope la tumeur et les ganglions que le chirurgien enlève lors de l’opération afin d’y déceler d’éventuelles cellules cancéreuses.

Le cancer est dit localisé lorsqu’aucune métastase n’est décelée. Même localisés, certains cancers risquent de rechuter. C’est le cas si la tumeur envahit toute la paroi du côlon ou du rectum et ou envahit des organes de voisinages (T4), si elle est révélée par des complications (perforation, occlusion) ou si elle a déjà envahi des ganglions. Dans ces cas, une chimiothérapie sera à envisager après l’opération.

Le cancer est dit généralisé lorsqu’il s’accompagne de métastases « viscérales ». Mais cela ne veut pas dire que le patient ne pourra pas guérir. Il arrive que des patients puissent guérir de leurs métastases lorsqu’elles sont peu nombreuses, grâce à la chirurgie, souvent précédée d’une chimiothérapie ou encore grâce à d’autres traitements comme la radiofréquence ou la radiothérapie moderne.

L’extension du cancer colorectal est évaluée par un examen clinique approfondi, comprenant un toucher rectal, un scanner thoracoabdomino-pelvien et parfois une IRM du foie ; pour les cancers du rectum une IRM pelvienne et/ou une échoendoscopie dans les formes localisées. Dans la plupart des cas le PET-scan n’est pas utile d’emblée dans le bilan de ces tumeurs.

Quels sont les différents stades de la maladie ?

Les stades du cancer colorectal dépendent de l’extension du cancer.

Différents systèmes de classification existent pour quantifier la gravité de l’atteinte cancéreuse. Ils sont assez proches les uns des autres.

La classification clinique péri-opératoire internationale appelée TNM permet de déterminer le stade de l’atteinte cancéreuse : T pour tumeur, N pour ganglion (node en anglais) et M pour métastase.

Le T se réfère à la profondeur atteinte par la tumeur ; il est gradué du T1, tumeur superficielle, au T4, grosse tumeur qui parfois envahit les organes de voisinage.

Le cancer est classé N0 quand les ganglions ne sont pas envahis, N1 quand 1 à 3 ganglions sont touchés, et N2 quand 4 ganglions ou plus sont envahis par les cellules tumorales.

M0 signifie l’absence et M1, la présence de métastases.

Une fois la classification établie, les tumeurs sont regroupées en stades. Le stade I comprend les tumeurs T1 ou T2, N0 et M0. Le stade II comprend les tumeurs T3, T4, N0 et M0. Le stade III rassemble les tumeurs T1, T2, T3 ou T4, N1 ou N2. Les métastases viscérales appartiennent au stade IV.

Auteurs

Pr Yann Parc
Chirurgien spécialisé en chirurgie générale et digestive, chef du service de Chirurgie Générale et Digestive à l'hôpital Saint-Antoine depuis 2015. De nombreuses distinctions académiques. Mène des recherches sur le cancer colorectal. Auteur de plus de 230 publications scientifiques.
Pr Yann Parc
Chirurgien spécialisé en chirurgie générale et digestive, chef du service de Chirurgie Générale et Digestive à l'hôpital Saint-Antoine depuis 2015. De nombreuses distinctions académiques. Mène des recherches sur le cancer colorectal. Auteur de plus de 230 publications scientifiques.
Pr Thierry André
Spécialiste en oncologie médicale et chef du service d'oncologie médicale à l'hôpital Saint-Antoine. Reconnu pour son expertise dans les cancers digestifs et de l'ovaire. Président de la Fondation ARCAD. Mène des recherches sur les cancers digestifs.


Pr Thierry André
Spécialiste en oncologie médicale et chef du service d'oncologie médicale à l'hôpital Saint-Antoine. Reconnu pour son expertise dans les cancers digestifs et de l'ovaire. Président de la Fondation ARCAD. Mène des recherches sur les cancers digestifs.


Pr Florence Huguet
Professeur des universités-praticien hospitalier d’Oncologie Radiothérapie (Sorbonne Université). Exerce à l’hôpital Tenon (Assistance Publique - Hôpitaux de Paris). Chef de service d’Oncologie Radiothérapie. Se concentre sur les cancers digestifs et ORL.
Pr Florence Huguet
Professeur des universités-praticien hospitalier d’Oncologie Radiothérapie (Sorbonne Université). Exerce à l’hôpital Tenon (Assistance Publique - Hôpitaux de Paris). Chef de service d’Oncologie Radiothérapie. Se concentre sur les cancers digestifs et ORL.
Pr Julien Taieb
Professeur des universités-praticien hospitalier d’Hépato-Gastro-Entérologie (Université Paris V) ; spécialisé dans la prise en charge des cancers digestifs, chef du service d’oncologie digestive de l’hôpital Européen Georges Pompidou (Assistance Publique - Hôpitaux de Paris).
Pr Julien Taieb
Professeur des universités-praticien hospitalier d’Hépato-Gastro-Entérologie (Université Paris V) ; spécialisé dans la prise en charge des cancers digestifs, chef du service d’oncologie digestive de l’hôpital Européen Georges Pompidou (Assistance Publique - Hôpitaux de Paris).

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