Le traitement du cancer colorectal

Comment se prend la décision thérapeutique ?

La prise en charge d’un cancer du côlon et du rectum nécessite l’intervention de plusieurs médecins. En général, le médecin généraliste est le premier consulté lors de l’apparition des premiers symptômes . Le deuxième intervenant est le gastro-entérologue pratiquant la coloscopie permettant de poser le diagnostic . Le radiologue, l’anatomopathologiste, le biologiste réalisent les examens du bilan d’extension. Ensuite, le chirurgien et le cancérologue interviennent en fonction du stade et dans un ordre qui peut varier : le plus souvent, c’est le chirurgien qui opère en premier, c’est parfois le radiothérapeute, en particulier pour la tumeur du rectum ou l’oncologue quand on commence par une chimiothérapie. La prise en charge suppose aussi l’intervention de nombreux autres acteurs (infirmières, aides soignantes, psychologues, diététiciennes, etc.).

Les traitements d’un patient atteint de cancer colorectal sont codifiés et discutés lors de réunions médicales appelées Réunions de Concertation Pluridisciplinaires (RCP) qui regroupent les spécialistes.

Le patient doit avoir une consultation d’annonce et de coordination de soins au cours de laquelle sont détaillés ses traitements. Lors de cette consultation, il rencontrera une infirmière dite d’annonce et/ ou de coordination de soin, qui lui expliquera ses traitements et en particulier, si indiqué, la chimiothérapie et les thérapies ciblées. Il peut aussi consulter un(e) psychologue, susceptible de l’aider à mieux coopérer dans cette période de début de traitement, un(e) diététicienne pour mieux choisir son alimentation, une socioesthéticienne pour apprendre à camoufler les effets secondaires esthétiques des traitements, une assistante sociale pour l’aider à résoudre ses problèmes de travail ou de couverture sociale, et pour le guider dans ses démarches.

 

La chirurgie

Chirurgie par laparotomie, cœlioscopie ou robot : comment choisir ?

La laparotomie, la cœlioscopie et la chirurgie par robot demandent des voies d’abord. En effet, le type de résection et de reconstruction, quelles que soient ces techniques de voie d’abord, sera le même. L’intervention à proprement parler devra dans tous les cas respecter les mêmes règles.

Ces règles ont pour objectif d’avoir le plus de chances possibles de guérison du cancer. Ainsi la voie d’abord ne doit pas avoir d’incidence sur la qualité de cette chirurgie et sur les chances de guérison.

La cœlioscopie est une façon d’opérer à l’aide d’une caméra qui est introduite dans la cavité abdominale. Cela permet de diminuer la taille de l’incision, par laquelle sera retirée la tumeur. En diminuant la taille des incisions, celle des cicatrices est moindre et le risque d’éventration diminue. De même, les cicatrices étant plus petites, la douleur est moindre et l’on peut espérer une sortie de l’hôpital plus rapide. Toutefois, ce bénéfice reste en général limité à une ½ journée ou une journée pour sortir plus rapidement de l’hôpital.

Dans le cadre de la chirurgie du cancer du côlon, l’abord par voie cœlioscopique a été démontré comme étant aussi efficace que par laparotomie. Pour ce qui est de la chirurgie du cancer du rectum, pour l’instant, il n’y a pas de démonstration d’un effet bénéfique de la cœlioscopie. Il reste quelques interrogations et il est recommandé que la chirurgie du cancer du rectum par voie cœlioscopique ne soit faite que dans des centres experts ayant une grande habitude de ces exérèses.

Pour ce qui est du robot, actuellement il fait l’objet d’une évaluation et il n’a pas été démontré qu’il permettait une chirurgie aussi bien faite que par cœlioscopie ou par laparotomie. Toutefois, cet instrument permet de procéder comme la chirurgie cœlioscopique mais par l’intermédiaire d’une machine qui stabilise les images, permet de retrouver une vision en trois dimensions et d’utiliser des instruments avec la mobilité des poignets, ce que l’on perd en cœlioscopie. Il semble donc peu probable que la chirurgie par l’intermédiaire d’un robot soit différente en terme de résultat carcinologique. Ainsi, les patients auront les mêmes chances de guérir de leur cancer qu’ils soient opérés à l’aide d’un robot, par laparotomie ou par cœlioscopie. L’important, c’est que le chirurgien qui prend le patient en charge ait l’expertise de la technique qu’il utilise. Il définira la technique la mieux adaptée à sa situation.

Comment se déroule l’opération ?

Le type d’intervention diffère selon la localisation exacte de la tumeur sur le côlon ou sur le rectum. On distingue également trois voies d’abord différentes pour réaliser ces opérations selon qu’il s’agit d’une laparotomie, d’une cœlioscopie ou d’une intervention par robot.

La chirurgie par laparotomie

Dans le cas d’une tumeur du côlon et du haut rectum, l’opération par laparotomie ou chirurgie classique débute par l’ouverture de l’abdomen. Le chirurgien réalise une incision verticale dans la peau qui s’étend de quelques centimètres au-dessus de l’ombilic jusqu’au pubis. La graisse sous-cutanée et les muscles sont ensuite écartés permettant l’accès à la cavité abdominale.

Le premier temps de l’opération consiste en l’exploration de la cavité abdominale avec une palpation du foie (à la recherche de métastases qui n’auraient pas été visualisées par les examens d’imagerie réalisés durant la période préopératoire) ainsi qu’en l’exploration de la totalité du côlon et du rectum. Elle peut être complétée en cas de doute par une échographie réalisée pendant l’intervention.

Le second temps consiste à enlever la tumeur. Cette dernière est repérée visuellement ou par la palpation (en fonction de sa taille). Sa résection suppose la section et la ligature préalable de l’artère irriguant la partie de l’intestin atteint et de la veine la drainant puis l’ablation de l’ensemble des ganglions répartis le long de ces vaisseaux. La partie du côlon enlevée comprend la zone cancéreuse et une dizaine de centimètres du gros intestin situé en amont et en aval de la tumeur. Le circuit intestinal est rétabli grâce à une suture (anastomose) réalisée au fil ou avec une agrafeuse automatique des deux segments du côlon restant. L’intervention se termine par la fermeture des différents plans musculaires et de la peau par des fils.

La chirurgie par cœlioscopie ou par robot

Elle permet de réaliser la plupart des interventions de chirurgie classique. Son avantage est de diminuer la taille de la cicatrice. Elle est faite sous anesthésie générale.

Cette technique a été évaluée d’abord pour les cancers du côlon dans les centres spécialisés et ses résultats sont équivalents à ceux obtenus par chirurgie classique lorsqu’elle est techniquement possible et réalisée par un chirurgien expérimenté. C’est aussi le cas pour certains cancers du rectum. En fait, plus que la voie, chirurgie classique ou chirurgie sous cœlioscopie, l’important est que le chirurgien puisse enlever complètement la tumeur afin de donner au patient les meilleures chances de guérir du cancer.

En pratique, en cœlioscopie, une petite incision est réalisée dans la peau au-dessus de l’ombilic. Elle permet, dans un premier temps, de gonfler la cavité abdominale avec du gaz puis d’introduire une caméra.

Dans un second temps, d’autres petites incisions sont réalisées. Elles permettent, sous contrôle de la caméra, d’introduire les instruments chirurgicaux nécessaires à l’intervention proprement dite.

Le cas particulier des tumeurs du moyen ou du bas rectum

Pour ce qui concerne les tumeurs du bas rectum, l’intervention peut nécessiter, en plus de l’abord abdominal décrit précédemment, un abord périnéal, c’est-à-dire un abord de la tumeur directement par l’anus. La suite de l’intervention dépend de la possibilité ou non de rétablir le circuit intestinal. Quand l’ablation de l’anus est nécessaire, le périnée (la zone proche de l’anus) est refermé par des f ils et un anus artificiel définitif est confectionné à partir du côlon gauche (colostomie définitive). Quand le circuit intestinal peut être rétabli, une suture entre l’anus et le côlon restant est réalisée, mais nécessite le plus souvent un anus artificiel temporaire réalisé au niveau du petit intestin (iléostomie) afin de protéger pendant environ 8 semaines la suture entre le côlon et l’anus.

En quoi consiste l’intervention et combien de temps dure-t-elle ?

La chirurgie a deux objectifs : enlever la tumeur de façon complète d’une part, et préciser le stade d’évolution du cancer, d’autre part. Le principe de base consiste à enlever le segment intestinal au sein duquel se situe la tumeur et à restaurer la continuité en suturant les extrémités restantes.

Le type d’intervention diffère selon qu’il s’agit d’un cancer du rectum ou du côlon.

L’intervention dans le cas d’un cancer du côlon consiste à enlever le segment d’intestin sur lequel est située la tumeur. La graisse entourant le côlon, dans laquelle la tumeur aurait pu s’étendre et qui contient des ganglions susceptibles d’être envahis, doit aussi être enlevée. Après l’ablation, les deux segments d’intestin restants sont suturés l’un à l’autre pour rétablir la continuité digestive.

Si la tumeur se situe sur le côlon droit, le chirurgien réalise une colectomie droite, c’est-à-dire une ablation de la partie droite du côlon puis pratique une anastomose iléo-colique (c’est-à-dire une suture entre l’iléon – partie terminale de l’intestin grêle – et le côlon restant). De même, si le cancer est situé sur la partie droite du côlon transverse, l’intervention consiste à enlever la partie droite du côlon et à étendre cette résection à la partie droite du côlon transverse ; l’anastomose sera entre l’iléon terminal et la partie gauche du côlon transverse.

Si la tumeur est localisée sur le côlon gauche ou la partie gauche du côlon transverse, le chirurgien réalise une colectomie gauche puis pratique une anastomose colo-colique (c’est-à-dire une suture entre le côlon transverse restant et le côlon sigmoïde). Si la tumeur est localisée sur le côlon sigmoïde (partie basse du côlon gauche), le chirurgien réalise une colectomie gauche mais il pratique, cette fois, une suture entre le côlon gauche et le rectum. La résection du côlon lors d’un cancer du côlon gauche est réalisée en fonction de la localisation exacte de la tumeur et l’anastomose est appelée anastomose colorectale ou colocolique en fonction du niveau de résection.

Quand la tumeur concerne le côlon sigmoïde, le cancer peut obstruer l’intestin et entraîner une occlusion colique, c’est-à-dire que le côlon en amont de la tumeur se distend et le transit par l’anus ne se fait plus. Dans ce cas, une intervention en urgence est nécessaire. Une première solution consiste à enlever le côlon sigmoïde porteur de la tumeur ainsi que la graisse se situant autour. Le rétablissement du circuit intestinal ne peut être réalisé car le côlon est très distendu. Dans cette situation d’urgence, l’intestin n’ayant pas été préparé, c’est-à-dire contenant encore des matières fécales, la suture risque de ne pas tenir. Le chirurgien réalise alors une stomie temporaire après l’ablation de la tumeur. Après 2 à 3 mois, le rétablissement de la continuité est réalisé par anastomose colorectale (suture entre le côlon et le rectum). Une deuxième solution consiste à ne réaliser qu’une stomie au-dessus de la tumeur sans enlever la tumeur pour lever l’occlusion colique. 8 jours après cette première intervention, le chirurgien réalise une deuxième intervention consistant à enlever la stomie et le sigmoïde contenant la tumeur, puis à rétablir la continuité digestive par une anastomose colorectale. Une troisième solution consiste à mettre en place par l’anus une prothèse qui va se dilater dans l’intestin au niveau de la tumeur et permettre la reprise du transit intestinal jusqu’à l’opération pour enlever la tumeur. Toutefois, cette solution s’avère être souvent décevante et peut entrainer des complications. C’est pourquoi elle est de moins en moins pratiquée.

Toutes ces interventions conduisent à couper (réséquer) au minimum 20 cm du gros intestin dont la longueur totale est d’1,5 mètre à 2 mètres. La durée de l’intervention est d’environ 2 à 4 heures en fonction des conditions opératoires.

L’intervention pour le cancer du rectum varie selon la localisation tumorale. Quand l’atteinte est située sur la partie haute du rectum, l’intervention est comparable à celle du cancer du côlon gauche. Quand elle est plus basse, l’intervention consiste en une ablation de l’ensemble du rectum et du territoire graisseux et vasculaire qui l’entoure qu’on appelle le mésorectum. Un rétablissement de la continuité du tube digestif entre le côlon et l’anus est possible si le pôle inférieur de la tumeur est à plus d’un centimètre du sphincter anal (muscle permettant de contrôler l’évacuation des selles). Dans certains cas, après avoir abaissé le côlon gauche, il est possible de créer avec la partie terminale du côlon un petit réservoir permettant de remplacer le rectum enlevé. La suture du côlon abaissé à l’anus étant fragile, il est nécessaire de la protéger par un anus artificiel temporaire ou stomie (voir question 19 et 26) qui permettra de dériver les matières fécales en amont de cette suture pendant la période de cicatrisation. Cet anus artificiel est supprimé 2 mois après l’intervention, parfois un peu plus tard en cas de chimiothérapie nécessaire.

Si le pôle inférieur de la tumeur est trop proche du sphincter, il peut être alors nécessaire de retirer le rectum et l’anus et de réaliser un anus artificiel, c’est-à-dire une colostomie définitive : abouchement du côlon à un orifice cutané par lequel les matières fécales vont s’évacuer.

La décision de garder ou non l’anus est le plus souvent prise pendant l’opération. L’opération peut durer entre 3 heures et 1/2 et 5 heures. Elle est délicate et doit être réalisée par un chirurgien et une équipe expérimentés pour atteindre les deux objectifs à savoir enlever complètement le cancer et préserver le mieux possible la fonction intestinale.

Qu’est-ce qu’une stomie (anus artificiel) ?

Le terme stomie signifie qu’un segment intestinal est abouché à la peau de l’abdomen latéralement à l’ombilic. Ce segment est fixé à la peau lors de l’intervention chirurgicale grâce à du fil résorbable. Une poche autocollante en matière synthétique, pouvant se vidanger, est positionnée autour de cet orifice. Elle permet le recueil des matières fécales. Cette poche jetable doit être changée à chaque fois qu’elle est pleine.

Cet anus artificiel remplace l’anus naturel et évacue les selles à sa place. Il peut être temporaire ou définitif selon les cas.

La colostomie définitive (anus artificiel définitif) réalisée dans le cadre d’un cancer du rectum très bas situé correspond à l’abouchement à la peau du segment de côlon restant. Les matières fécales s’évacuent alors définitivement par ce segment et non plus par l’anus qui a été enlevé.

L’iléostomie latérale (anus artificiel temporaire) correspond à l’abouchement de la partie distale de l’intestin grêle (iléon) à la peau. L’extériorisation latérale de ce segment de petit intestin permet d’évacuer les matières à ce niveau protégeant ainsi la suture intestinale réalisée en aval sur le rectum.

Dans les services de chirurgie réalisant des stomies, des infirmièr(e)s stomathérapeutes apprennent aux patients à vivre avec une stomie. Le rôle de l’infirmièr(e) stomathérapeute est essentiel au sein de l’équipe interdisciplinaire qui prend en charge les patients atteints d’un cancer du côlon nécessitant une stomie.

Elle rassure, conseille et accompagne le patient avant, pendant et après l’hospitalisation et prépare son autonomie grâce à l’éducation thérapeutique.

Quelles sont les suites immédiates de l’opération ?

Lorsque le patient revient dans sa chambre, plusieurs « tuyaux » ou « tubes » sont reliés à son corps.

Une sonde nasale permet de lui délivrer de l’oxygène pendant les quelques heures qui suivent sa sortie de la salle d’opération.

La sonde gastrique fixée par un adhésif à l’autre narine et qui descend dans son estomac permet d’aspirer les sécrétions gastriques afin d’éviter d’éventuels vomissements. Ces sondes nasogastriques sont de moins en moins laissées en place. Le plus souvent, elles sont retirées au moment du réveil en salle d’opération.

Une sonde urinaire permet d’assurer la bonne vidange de la vessie pendant 1 à 3 jours.

La perfusion, généralement administrée dans une veine du bras, permet d’apporter au patient les liquides (ou solutions) garantissant son hydratation et de lui injecter des médicaments contre la douleur. La perfusion sera enlevée le plus rapidement possible dès que les médicaments pourront tous être administrés par voie orale et l’alimentation du patient sera jugée correcte, en général au bout de 2 à 3 jours. L’apparition de gaz signe la reprise du transit. Il n’est pas rare de ne pas avoir de selles pendant les 7 à 10 premiers jours suivant l’intervention. Les premières matières fécales peuvent être diarrhéiques avec des traces de sang.

La douleur ressentie à la suite de l’intervention est prise en considération dès la sortie de la salle d’opération. Elle est évaluée et calmée dès la salle de réveil. Les doses d’antalgiques (médicaments antidouleur) sont adaptées aux besoins du patient opéré. Une autre solution consiste à mettre en place une PCA (Analgésie Contrôlée par le Patient) permettant au patient d’adapter lui-même le débit d’une seringue électrique qui lui administre un traitement antidouleur à base de morphine. Il est aussi le plus souvent utilisé une méthode anesthésique en délivrant les antalgiques directement au niveau du rachis (péridurale) ou dans la plaie (cathéter pariétal). Au bout de 3 jours, il est généralement possible de passer des antalgiques majeurs, administrés par voie veineuse, à des antalgiques mineurs, administrés par voie orale.

Comment fonctionne l’intestin après l’opération ?

La chirurgie d’exérèse partielle du côlon est, à terme, le plus souvent sans conséquence sur le transit qui, après un délai de 3 mois, fonctionne à peu près comme avant l’opération. Dans certains cas, le transit peut cependant être accéléré (diarrhée) ou ralenti (constipation).

Si le patient a eu un cancer du rectum ayant permis la conservation de l’anus, la fonction intestinale peut être très variable d’une personne à l’autre. Chez certaines elle est sensiblement identique à avant l’intervention. Chez d’autres, elle peut être moins bonne, et notamment chez les personnes plus âgées, lorsque la tumeur était proche du sphincter de l’anus, ou lorsqu’on a administré des rayons avant l’opération. Le nombre moyen de selles varie de 2 à 4 par jour, le nombre de selles nocturnes allant d’aucune à 1 par nuit. La discrimination entre les gaz et les selles, la capacité à se retenir plus d’¼ d’heure, la qualité de la continence (absence de fuites) sont satisfaisantes dans la plupart des cas. Pour les patients qui n’auraient pas d’aussi bons résultats dans les premiers mois qui suivent l’opération, la situation peut s’améliorer progressivement l’année suivante. Diverses mesures comme l’administration de médicaments pour modifier le transit intestinal ou l’usage de lavements peuvent aider à améliorer le confort dans la période qui suit le rétablissement de la continuité intestinale.

Quelles sont les complications possibles de la chirurgie ?

Les complications sont toujours possibles.

La complication majeure de la chirurgie colorectale est la mauvaise cicatrisation de la suture de l’intestin qui peut être à l’origine d’un simple abcès ou d’une infection intra-abdominale (péritonite). Ces complications (entre 5 % et 10% des cas) peuvent nécessiter parfois de nouvelles interventions chirurgicales, avec constitution de stomie (anus artificiel).

Comme après toute intervention chirurgicale imposant une immobilisation, il existe un risque de phlébite (constitution d’un caillot de sang dans une veine des jambes). La prévention de cette affection nécessite des injections de médicaments pour éviter la coagulation du sang (anticoagulant). Ces injections sont faites dans la peau du ventre ou des cuisses pendant toute l’hospitalisation et sont poursuivies plusieurs semaines après. Leur efficacité est renforcée grâce à la contention par le port de bas à varices.

D’autres complications moins graves peuvent survenir ; elles sont dominées par les infections superficielles de la paroi abdominale, comme des hématomes (poches de sang), lymphocèles (poches de lymphe)… Le traitement fait appel à des pansements locaux.

Des infections urinaires peuvent également survenir, favorisées par la présence de la sonde urinaire pendant 1 à 3 jours après l’opération. Elles peuvent être maîtrisées grâce à un traitement antibiotique de 8 jours.

Le risque de décès au cours de ces opérations est en France de 3,7%. Cette mortalité est fortement influencée par le nombre d’interventions pratiquées dans les centres les pratiquant. Plus le nombre est élevé, plus la mortalité est basse. Elle dépend également de l’état général et de l’âge du patient.

Des troubles de l’érection ou une impuissance chez l’homme, une sécheresse vaginale chez la femme sont possibles en cas de chirurgie du rectum car les nerfs qui commandent la fonction sexuelle passent à proximité du rectum et leur fonctionnement peut être perturbé par l’intervention chirurgicale mais également par la radiothérapie. L’intervention ne peut pas toujours éviter la section de ces nerfs et l’impuissance définitive secondaire est alors observée. Le patient doit être prévenu du risque d’impuissance et d’anéjaculation chez l’homme et de dyspareunie chez la femme (douleurs lors des rapports sexuels) qui survient dans environ 20 % des cas.

En cas de chirurgie du rectum, surtout si la tumeur est bas située, des troubles de l’évacuation avec parfois des fuites anales peuvent survenir.

 

Combien de temps dure l’hospitalisation ?

L’admission à l’hôpital se fait la veille de l’hospitalisation pour revoir le chirurgien ainsi que l’anesthésiste et vérifier l’absence de contreindication opératoire de dernière minute.

Après l’intervention suivie d’une surveillance de 3 heures environ en salle de réveil, le patient regagne sa chambre en secteur d’hospitalisation. Il peut recommencer à boire dès le soir de l’intervention. L’alimentation est reprise rapidement avant que le transit n’ait repris. Toutefois, si des nausées apparaissent le régime est allégé.

En l’absence de toute complication, le patient peut sortir dès le 3ème jour, notamment en cas de prise en charge dans un programme de réhabilitation précoce. Le délai est un peu plus long pour le cancer du rectum que pour le cancer du côlon. La sortie n’est évidemment autorisée que si tous les indicateurs médicaux sont bons (reprise du transit, alimentation et marqueurs de l’inflammation sous certains seuils) ; en cas de doute ou d’indicateur encore tangent, le patient sera gardé en hospitalisation.

Quels sont les progrès chirurgicaux réalisés ?

En ce qui concerne la chirurgie du côlon, l’amélioration de la connaissance de la dissémination tumorale (extension locorégionale de la tumeur) a permis de standardiser les techniques d’exérèse (ablation) complète de la tumeur et des ganglions locorégionaux. Cette standardisation a l’avantage de permettre des bilans d’extension plus précis et de mieux adapter les traitements postopératoires (chimiothérapie par exemple).

De nombreux progrès ont également été réalisés dans la prise en charge du cancer du rectum au cours des 30 dernières années. Comme pour le cancer du côlon, l’amélioration de la connaissance de l’extension locorégionale de la tumeur a contribué au développement de techniques d’exérèses ganglionnaires plus complètes permettant de diminuer le taux des récidives locales, celles-ci survenant désormais dans moins de 10 % des cas. Les avancées des techniques chirurgicales ont contribué, par ailleurs, à améliorer le taux de conservation de l’anus qui atteint désormais 90 % chez les équipes spécialisées, ceci dépendant du niveau de la tumeur.

Une meilleure compréhension de l’anatomie du rectum a permis, quant à elle, le développement d’interventions diminuant le risque de séquelles chirurgicales, en particulier les séquelles sexuelles comme l’impuissance ou les troubles de l’éjaculation.

La technique permettant de créer des réservoirs (néo-rectum) visant à remplacer le rectum enlevé contribue à faire baisser le nombre des séquelles intestinales à moyen et long terme (fréquence des selles, envies pressantes, fragmentation des selles…) et donc à améliorer la qualité de vie.

Quelles sont les conséquences de l’opération à moyen et long terme ?

À moyen terme et quel que soit le type d’intervention, il faut arrêter momentanément :

  • toute activité professionnelle ;
  • la pratique d’un sport ou de toute activité physique soutenue (course, port de charge…).

Le chirurgien jugera de la capacité du patient à reprendre ses activités.

Le patient n’a à suivre un régime alimentaire spécifique que s’il est porteur d’un anus artificiel temporaire (voir question 26). Dans ce cas, il lui est recommandé de boire au minimum 1 litre et 1/2 de boissons par jour pour éviter la déshydratation.

Le transit intestinal risque d’être perturbé (diarrhée, constipation ou alternance des deux) pendant les mois qui suivent la chirurgie colique ou rectale sans que cela soit inquiétant. Au-delà de ce délai, le transit intestinal des patients traités pour une tumeur du côlon, revient à la normale.

La chirurgie du rectum, comprenant une exérèse (ablation) totale ou subtotale du rectum, peut en revanche perturber le fonctionnement intestinal plus longtemps et de manière plus importante. Il est possible que le nombre de selles soit augmenté et atteigne 3 à 4 par jour, que la capacité à se retenir plus d’un 1/4 d’heure soit diminuée, que la discrimination entre les gaz et les selles soit difficile et que des épisodes d’incontinence anale persistent plusieurs mois. Ces troubles peuvent être en partie améliorés par la prise de médicaments qui ralentissent le transit intestinal ou de lavement. Ils ont tendance à régresser au cours des années suivant l’intervention.

Comment vivre avec un anus artificiel définitif ou temporaire ?

La situation diffère selon la nature de la stomie. Lorsque l’anus artificiel est temporaire, les selles évacuées sont liquides car le transit intestinal est écourté (puisqu’il n’y a pas de passage par le côlon). Quand il est définitif, le transit est quasiment complet et les selles évacuées sont donc solides.

L’anus artificiel temporaire est maintenu en général pendant une période minimale de 6 à 8 semaines. Du fait du caractère liquide des selles, il est généralement nécessaire de suivre un régime alimentaire pauvre en fibres et de consommer au moins 1,5 litre de boisson par jour pour compenser les pertes d’eau (1/2 litre à 1 litre par jour), la réabsorption par le côlon ne se faisant plus correctement.

En cas d’anus artificiel définitif, le patient doit s’habituer à vivre avec une nouvelle contrainte. Les selles sont recueillies dans une poche jetable dont une partie adhère à la peau avec un filtre pour évacuer et désodoriser les gaz. Lors du changement de poche, il est nécessaire d’enlever les débris de selles sur la stomie et de nettoyer la peau autour. Après avis du chirurgien, le patient pourra effectuer des lavements par la stomie (irrigations coliques) qui évitent l’émission de selles pendant 48 heures. Cette pratique permet de décider des périodes d’évacuation des selles et autorise le port d’une poche plus petite ou d’un obturateur.

Progressivement le patient deviendra autonome pour changer sa poche et faire les soins appropriés réduisant les risques d’irritation de la peau. Compte tenu du caractère solide des selles, aucun régime alimentaire particulier n’est à recommander.

Des programmes d’Education Thérapeutique du Patient sont mis en place par certaines structures pour aider le nouveau stomisé. Les infirmièr(e)s stomathérapeutes sont en charge de cette éducation thérapeutique.

Le patient pourra reprendre certaines activités mais devra rester prudent (risque d’éventration). La reprise du sport, y compris des baignades peut tout à fait être envisagée. Elle est même recommandée. La vie de couple et la vie de famille sont tout à fait compatibles avec le port d’une stomie. 80 000 à 100 000 personnes sont actuellement stomisées en France. Des associations se sont créées à l’échelon local et national pour leur venir en aide. Des réunions leur permettent d’échanger des expériences sur la vie quotidienne, le matériel et le remboursement.

 

Quel suivi doit être pratiqué après l’intervention ?

Pendant l’hospitalisation, le chirurgien rend visite au patient tous les jours et l’équipe soignante le prend totalement en charge. Une fois sorti, le patient rencontre son chirurgien lors de la première visite de contrôle au bout de 3 semaines à 1 mois. Ce dernier l’examine complètement de façon à s’assurer de la bonne cicatrisation de la paroi de son abdomen ou de son pelvis et de l’absence de complications chirurgicales.

La surveillance ultérieure de la maladie nécessite un suivi régulier pendant minimum 5 ans. Ce suivi peut être réalisé par un chirurgien, un gastro-entérologue, un oncologue ou un médecin généraliste au rythme de 3 à 4 consultations par an au cours des 2 ou 3 premières années, puis de 2 consultations par an pendant les 3 années suivantes. La surveillance repose sur la réalisation d’examens cliniques (interrogatoire, observation et palpation de l’abdomen, toucher rectal), de prises de sang avec dosage de l’ACE, de coloscopies, de radiographies pulmonaires et d’échographies ou de scanners thoraco-abdominaux. Ces examens permettent de dépister une éventuelle récidive locale ou de détecter l’apparition de métastases à distance (au foie, au poumon, au péritoine…), pour lesquels sont disponibles des traitements de plus en plus actifs.

L’intervention peut-elle être évitée ?

La chirurgie est le traitement permettant d’obtenir la guérison d’un cancer du côlon ou du rectum quand il n’existe pas de métastase. Elle doit donc être réalisée chaque fois qu’elle est possible. Dans le cas du cancer du rectum, la chirurgie peut être précédée d’une chimiothérapie et/ou d’une radiothérapie et/ou d’une radio chimiothérapie. Plusieurs possibilités seront discutées avec les médecins pour définir la meilleure stratégie en fonction de la localisation et du stade du cancer du rectum (voir question 70). Certains cancers du côlon ou du rectum petits et superficiels peuvent faire l’objet d’une ablation par endoscopie et pour les tumeurs du rectum d’une intervention par voie trans-anale.

En l’absence de prise en charge médicochirurgicale, la tumeur risque immanquablement de se compliquer à terme d’une hémorragie (saignement), d’une occlusion intestinale (interruption complète du transit) ou d’une perforation intestinale. Ces complications nécessitent alors une intervention chirurgicale en urgence et imposent généralement la réalisation d’un anus artificiel. Cet anus artificiel aurait souvent pu être évité si l’intervention avait eu lieu « à froid », c’est-à-dire à distance de toute complication nécessitant un traitement en urgence.

Dans le cas des cancers du rectum, dans certains cas, extrêmement sélectionnés, il est possible de ne pas proposer d’opération en cas de radio-chimiothérapie suivie d’une excellente réponse avec disparition complète de la tumeur.

L’intervention altère-t-elle la qualité de vie ?

L’intervention en cas de cancer du côlon ou du rectum a un retentissement physique et psychosocial important et peut altérer la qualité de vie du patient pendant un certain temps.

Mais, en l’absence de complications et en dépit des nouvelles contraintes, le patient retrouve progressivement ses habitudes sociales, sexuelles et alimentaires antérieures.

Après la chirurgie du rectum, une qualité de vie correcte est observée dans 80 % des cas. Dans 20 % des cas, des troubles intestinaux et sexuels peuvent persister et aggraver le handicap.

L’anus artificiel définitif est reconnu comme un handicap par le décret 2007-1574 du 6 novembre 2007.

Pourquoi recevoir un traitement complémentaire si la tumeur est totalement éliminée par la chirurgie ?

Bien que la chirurgie du cancer colorectal permette d’enlever complètement la tumeur et les ganglions, un traitement complémentaire par chimiothérapie dite adjuvante peut être nécessaire.

Il doit être réalisé lorsque l’analyse post-opératoire révèle l’existence de cellules cancéreuses dans les ganglions enlevés avec la tumeur. La présence de ces cellules témoigne en effet d’une extension à distance de la tumeur. Dans ce cas de figure il a été démontré, en cas de cancer du côlon et du rectum, que la chimiothérapie augmentait la survie à long terme (voir question 35). En l’absence de cellules dans les ganglions, en fonction d’autres facteurs, une chimiothérapie adjuvante peut parfois être indiquée.

Chirurgie et traitement des métastases hépatiques : quelles indications, comment se déroule cette chirurgie ?

La survenue de métastases hépatiques en cas de cancer du côlon ou du rectum n’est pas un événement rare et la chirurgie des métastases hépatiques représente une étape essentielle dans le traitement de celles-ci.

Les métastases hépatiques peuvent être définies en deux grandes catégories. Soit elles sont découvertes en même temps que la tumeur primitive et on dit qu’elles sont synchrones ; soit elles surviennent dans le cadre du suivi d’un patient ayant eu un cancer du côlon ou du rectum, on dit qu’elles sont métachrones.

Enfin, les métastases, en fonction de leur nombre, de leur taille et de leur localisation à proximité de certains vaisseaux vont pouvoir être définies comme étant résécables.

Dans le cas de métastases non résécables, (si l’on essayait de les réséquer, on enlèverait trop de quantité du foie avec un risque d’insuffisance hépato-cellulaire non compatible avec la vie), le traitement proposé doit comprendre de la chimiothérapie ± des thérapies ciblées. Il pourra toujours être discuté en cas de nette diminution du nombre et de la taille des métastases, après chimiothérapie ± thérapies ciblées, d’opérer en présence de métastases initialement non résécables.

En cas de tumeurs résécables, plusieurs options seront discutées.

En cas de métastase(s) métachrone(s), la stratégie devra déterminer s’il faut commencer par de la chimiothérapie ou si l’on peut commencer par la chirurgie. Cet élément sera défini en Réunion de Concertation Pluridisciplinaire -RCP- en fonction de la date de survenue de la métastase par rapport à l’exérèse de la tumeur primitive et/ou de la réalisation d’une chimiothérapie préalable.

En fonction de la localisation des métastases, il sera réalisé une résection hépatique ou plusieurs résections hépatiques emportant plusieurs morceaux de foie. Dans un certain nombre de cas, il aura peut-être été nécessaire de faire grossir la partie du foie qui devra subsister. Pour ce faire, il est possible de réaliser ce que l’on appelle une ligature ou une embolisation portale. En effet, le foie peut être divisé anatomiquement en deux, un foie droit et un foie gauche en fonction de sa vascularisation. En bouchant la grosse veine qui va dans le foie que l’on veut réséquer, on entraîne alors une hypertrophie du foie qui devra rester. Ainsi, il est possible de faire une résection d’un morceau de foie plus important qui, s’il avait été réséqué sans préparation, aurait entraîné le décès du patient par insuffisance hépatique, le foie restant n’étant pas suffisamment volumineux pour assurer sa fonction. Il est d’ailleurs parfois nécessaire de réaliser le traitement de ces métastases en deux temps. Le premier temps consiste à enlever les métastases, en même temps de lier ou d’emboliser la veine porte du foie restant sur lequel d’autres métastases sont en place pour entraîner l’atrophie et l’hypertrophie du foie. Ainsi, le foie « nettoyé » va pouvoir grossir et il sera possible dans un second temps d’enlever le foie présentant encore des métastases et dont on a entraîné l’atrophie par la ligature ou l’embolisation portale.

Dans le cas de métastase(s) synchrone(s), toutes les stratégies venant d’être décrites peuvent être pratiquées. Ces stratégies vont devoir intégrer la prise en charge de la tumeur primitive. Il est difficile de résumer les attitudes thérapeutiques possibles mais de façon simplifiée, c’est en fonction de la menace d’évolutivité la plus importante que l’on va être amené à proposer le traitement chirurgical de la lésion la plus menaçante. Ainsi, si la tumeur primitive est plus menaçante que les métastases hépatiques, on aura une attitude thérapeutique première sur la lésion primitive. Si en revanche, ce sont les lésions hépatiques qui semblent les plus menaçantes, on ira vers un traitement chirurgical des métastases hépatiques en priorité. Dans certaines situations, il est possible de proposer un traitement chirurgical en un seul temps, c’est-à-dire à la fois de la tumeur du côlon et du rectum et des métastases hépatiques.

La résection des métastases hépatiques peut être parfois remplacée par d’autres méthodes de thermo-ablation : la radiofréquence ou la destruction par micro-ondes, la cryothérapie. La radiofréquence ou les micro-ondes sont des techniques souvent pratiquées. Les techniques peuvent être faites soit en percutané avec guidage radiologique, soit au cours d’une intervention chirurgicale. Dans ce dernier cas, il s’agit souvent de compléter une résection hépatique avec la destruction d’une lésion dont la résection s’avérerait dangereuse. La radiothérapie stéréotaxique ou cyberknife est également un traitement qui peut remplacer la chirurgie ou la thermo-ablation. Le choix doit être déterminé en réunion de concertation multidisciplinaire.

Chirurgie et thermo-ablation ou radiothérapie stéréotaxique des métastases pulmonaires : quelles indications ? Comment se déroule cette chirurgie ?

La chirurgie d’exérèse des métastases pulmonaires est parfois indiquée. Toutefois, cette chirurgie s’adresse à des patients très sélectionnés. Pour avoir un sens, cette chirurgie doit faire l’exérèse de la totalité des métastases présentes. L’intervention peut se faire soit avec de petites incisions et un système de caméra et d’instruments selon une technique dite de vidéo-thoraco-scopie, soit nécessiter une intervention plus classique avec thoracotomie.

Depuis l’avènement de la thermo-ablation pour le traitement des tumeurs hépatiques à la fin des années 1990, les techniques de destruction locale ont étendu leur champ d’action vers d’autres organes que le foie, notamment le poumon. En cas de métastases peu nombreuses, une alternative à la chirurgie peut être la destruction de métastase(s) soit par radiofréquence, soit par microondes. Ce sont des techniques de destruction tumorale percutanée sous guidage de l’image (c’est-à-dire sans opération chirurgicale et sous contrôle du scanner). La précision du placement des électrodes et donc le choix de l’imagerie de guidage sont des éléments clés du succès de ces techniques qui font appel à une destruction thermique par propagation d’un courant électrique de haute fréquence à même de réchauffer les tissus par agitation ionique. La radiofréquence comme les micro-ondes induisent une destruction thermique et n’ont aucune spécificité pour la tumeur. Le but est de porter les tissus à des températures supérieures à 60°C. La technique de micro-ondes utilise des fréquences beaucoup plus élevées que la radiofréquence (400kHz), et la conséquence est une longueur d’onde plus courte, avec des avantages et des inconvénients pour les 2 techniques. Ce sont des radiologues interventionnels qui pratiquent ces techniques ; ils seront le plus à même de définir quelle technique est la mieux adaptée à chaque patient.

La « radiochirurgie » stéréotaxique est une autre méthode moderne de destruction des métastases.

La chimiothérapie

Qu’est-ce que la chimiothérapie et quelles en sont les indications ?

La chimiothérapie est un traitement médicamenteux dont le principe est de détruire les cellules tumorales de deux façons : soit en agissant directement sur la cellule, soit en agissant indirectement, c’est-à-dire en la privant des éléments essentiels à sa multiplication. Les principales cibles des médicaments de la chimiothérapie sont les acides nucléiques, l’ADN et l’ARN qui permettent aux cellules de fonctionner et de se multiplier.

Il faut un traitement général capable de diffuser dans tout l’organisme pour détruire les cellules tumorales invisibles. Pour traiter un cancer du côlon, la chimiothérapie par voie générale est la plus adaptée. Ces traitements généraux s’appellent aussi traitements systémiques. Lorsqu’ils sont administrés pour prévenir une rechute, ils sont appelés traitements adjuvants. Ces traitements adjuvants visent un cancer curable à risque de rechute.

En cas de stade I, il n’y a pas d’indication à une chimiothérapie adjuvante. En cas de stade II, le risque de rechute est faible et l’indication d’une chimiothérapie adjuvante doit être discutée en réunion de concertation pluridisciplinaire -RCP- au cas par cas et proposée avec toutes les explications nécessaires au patient. Les stades III ont un risque de rechute car les ganglions sont envahis ; ce risque est d’autant plus important que leur nombre est élevé (voir question 35). La rechute est due au développement de cellules tumorales ayant migré dans un autre organe, souvent après une longue période où elles sont restées invisibles ; en effet il faut en moyenne 1 à 3 ans pour que la maladie métastatique se développe et devienne visible. Pour les stades III, une chimiothérapie adjuvante a démontré son intérêt en diminuant le risque de rechute.

Enfin, pour les stades IV qui ont déjà des métastases, le traitement par chimiothérapie avec le plus souvent des thérapies ciblées est indiqué si l’on veut favoriser au maximum les chances de survie tant Enfin, pour les stades IV qui ont déjà des métastases, le traitement par chimiothérapie avec le plus souvent des thérapies ciblées est indiqué si l’on veut favoriser au maximum les chances de survie tant en durée qu’en qualité. Dans des cas de plus en plus nombreux et qui sont souvent les plus favorables, les patients ont pu être opérés et leurs métastases ont pu être enlevées ; dans ce cas, le traitement postopératoire est à nouveau considéré comme adjuvant, mais il n’est pas toujours recommandé. Parfois, l’intervention sur les métastases n’est pas réalisable d’emblée parce que la tumeur est trop volumineuse ou mal placée. Le traitement par chimiothérapie associé à des thérapies ciblées sert alors à diminuer la taille de la tumeur avant de l’opérer. Le traitement est alors dit néo-adjuvant.

Un certain nombre de patients ayant un cancer métastasé ne peuvent pas guérir. Le traitement par chimiothérapie et thérapies ciblées reste cependant indiqué pour stopper la progression de la maladie, éviter l’apparition de symptômes désagréables et permettre de vivre le plus longtemps possible. Le traitement ne peut permettre la guérison mais peut permettre une survie prolongée.

Quels sont les médicaments utilisés et comment agissent-ils ?

Les médicaments utilisés en chimiothérapie dans le traitement du cancer colorectal sont :

  • les antimétabolites : ils inhibent la fabrication (synthèse) des protéines et la réplication de l’ADN en bloquant les enzymes clés de ces mécanismes et en s’incorporant frauduleusement dans les acides nucléiques (ADN et ARN) présents dans le noyau de la cellule. Ces médicaments privent en quelque sorte les cellules des moyens de se diviser, provoquant ainsi la mort de la cellule maligne qui est plus sensible que la cellule normale car elle se trouve en état de multiplication constante. L’effet de l’antimétabolite le plus habituellement utilisé est potentialisé par la vitamine B9 ou son dérivé l’acide folinique (à ne pas prendre en dehors du traitement). Ces antimétabolites sont le 5-fluorouracile (5-FU), la capécitabine et la trifluridine tipiracile. L’uracile-tegafur (UFT) et le raltitrexed sont moins utilisés.
  • les dérivés du platine : ils agissent sur l’ADN en créant des ponts inter ou intra-brins. Ceci aboutit encore à empêcher la réplication de l’ADN et à le casser, entraînant la perte de la cellule maligne. Le dérivé du platine efficace dans le cancer colorectal est l’oxaliplatine.
  • un inhibiteur de la topo-isomérase 1 : cet enzyme permet à l’ADN de réparer les cassures produites par l’enroulement du brin d’ADN lors de sa réplication. Cet inhibiteur est l’irinotécan.

Les médicaments sont administrés par voie intraveineuse en perfusion ou par voie orale (par la bouche) pour la capécitabine et la trifluridine tipiracile.

Il existe par ailleurs de nouveaux médicaments, les thérapies ciblées ; ce sont des anticorps monoclonaux ou des petites molécules bloquant la signalisation cellulaire.

L’immunothérapie, qui vise à rendre le système immunitaire efficace pour tuer les cellules cancéreuses a montré son grand intérêt chez un nombre malheureusement limité de patients avec un cancer colorectal présentant un statut microsatellite instable (MSI).

Dans quel(s) cas la chimiothérapie adjuvante est-elle conseillée ou nécessaire ?

Le mot adjuvant signifie l’ajout d’une chimiothérapie après la chirurgie pour diminuer le risque de rechute.

Il n’y a pas d’indication à une chimiothérapie adjuvante en cas de stade I (très petite tumeur sans métastase ganglionnaire).

En cas de stade II (tumeur sans métastase ganglionnaire), le risque de récidive (essentiellement métastatique) est de l’ordre de 20%. En effet, 80% des patients ayant une résection chirurgicale de leur cancer à ce stade ne récidivent pas après la chirurgie. Le bénéfice en survie d’une chimiothérapie adjuvante est modéré (entre 3 et 5 % en valeur absolue). L’indication d’une chimiothérapie est une discussion d’expert discutée en réunion de concertation pluridisciplinaire -RCP-. Cette discussion se fait au cas par cas avec évaluation du rapport bénéfice-risque. Un gain potentiel est à pondérer en fonction du risque de toxicités de la chimiothérapie et doit être réservé aux patients avec de forts facteurs de risque de rechute (comme une tumeur perforée ou révélée par une occlusion). Des essais thérapeutiques, notamment en France l’essai du groupe PRODIGE[1], coordonné par le Pr Julien TAIEB, évaluent le rôle de la recherche d’ADN tumoral circulant dans le sang. En effet en présence après l’intervention d’ADN tumoral circulant dans le sang le risque de récidive est élevé. Dans ce cas peut se justifier la prescription d’une chimiothérapie.

En cas de stade III, c’est-à-dire en cas de métastase(s) ganglionnaire(s), une chimiothérapie adjuvante (voir question 37) doit être proposée même si le patient est toujours libre d’accepter ou non le traitement. C’est en effet dans cette situation que le bénéfice statistique est maximal. Le risque de rechute (survenue de métastases et/ou plus rarement rechute locorégionale) est alors après chirurgie d’environ 40% sans traitement adjuvant (moins si la tumeur est petite, plus s’il s’agit d’une grosse tumeur avec plus de 3 ganglions envahis). Le bénéfice en survie d’une chimiothérapie adjuvante est important car il permet d’augmenter le nombre de patients guéris (50 à 60% avec la chirurgie) à environ 75 à 80 % de patients guéris après chirurgie puis chimiothérapie adjuvante.

Enfin, pour les patients ayant eu une exérèse chirurgicale de métastases découvertes en même temps que la tumeur du côlon ou du rectum, la chimiothérapie adjuvante ou néoadjuvante (avant l’opération) est indiquée le plus souvent.

Combien de temps dure le traitement médical ?

Une chimiothérapie adjuvante, c’est-à-dire administrée après l’exérèse de la tumeur primitive du côlon ou du rectum et visant à diminuer le risque de rechute après l’intervention dure entre 3 et 6 mois. Une grande étude internationale a permis de déterminer en fonction de la classification TNM de la tumeur, ainsi que du schéma de chimiothérapie que le médecin a prescrit, si la durée de traitement peut être de 3 ou 6 mois.

En cas de métastases inopérables, la chimiothérapie avec le plus souvent des thérapies ciblées sera à réaliser sur une plus longue durée. Les protocoles de traitement se succèdent lorsqu’un échappement se produit au premier traitement. D’autres traitements pourront alors être proposés. Le concept de pause thérapeutique (ou fenêtre thérapeutique) a été validé pour les patients ayant des conditions favorables. Cet arrêt temporaire du traitement permet aux patients de récupérer et de vivre sans traitement spécifique. Certains patients peuvent bénéficier de cette nouvelle stratégie qui préserve la qualité de vie avec parfois de longues périodes sans chimiothérapie ni thérapeutiques ciblées.

Comment se passe la chimiothérapie adjuvante ?

La chimiothérapie adjuvante repose sur la combinaison d’un antimétabolite (5-fluorouracile (5-FU) ou capécitabine) ± l’oxaliplatine. Les deux protocoles les plus performants sont le FOLFOX associant 3 molécules (acide folinique, 5-fluorouracile (5-FU), oxaliplatine) et le XELOX associant 2 molécules (capécitabine et oxaliplatine). Ces traitements sont les plus efficaces pour éviter les rechutes après l’opération.

Le protocole FOLFOX est administré sur 48 heures toutes les 2 semaines. Le patient doit alors venir quelques heures à l’hôpital de jour ou s’il est fatigué rester 2 jours de suite à l’hôpital. Le patient reçoit en 2 heures environ l’acide folinique et l’oxaliplatine ainsi que des médicaments destinés à prévenir les nausées. Le traitement par le 5-FU est administré en 2 temps : une partie du produit est injectée rapidement, via la chambre implantable et le reste du produit est perfusé beaucoup plus progressivement grâce à une petite pompe branchée sur la chambre implantable pendant les 46 heures du traitement (voir question 42). Les principaux effets secondaires de ce protocole sont la diminution des globules blancs, des réactions au froid (crampes, douleurs, fourmillement dans les mains et dans les pieds), des nausées, et tardivement, une atteinte des nerfs sensitifs touchant plus les pieds que les mains et qui peut, dans les cas les plus sévères, gêner la vie quotidienne. Cette atteinte est réversible dans la plupart des cas.

Concernant le protocole XELOX (capécitabine et oxaliplatine), la perfusion de 46 heures de 5-fluorouracile (5-FU) est remplacée par la prise orale matin et soir de plusieurs comprimés de capécitabine, 2 semaines sur 3 ; l’oxaliplatine étant elle administrée toutes les 3 semaines par voie intraveineuse en hôpital de jour. Ce protocole fait moins diminuer les globules blancs que le FOLFOX mais donne plus de diarrhées et parfois des lésions des mains et des pieds caractéristiques que l’on appelle le syndrome mains-pieds. En cas de traitement oral, il ne faut pas hésiter à signaler tout symptôme anormal lors de la prise du traitement. Il a comme intérêt de parfois éviter la mise en place du cathéter veineux central.

Dans certaines circonstances (patients de stade II ou patients âgés), il est préférable de faire la chimiothérapie sans oxaliplatine. Cette décision appartient aux médecins après estimation du bénéfice/ risque.

Avant chaque chimiothérapie, quel que soit le protocole administré, le patient doit le jour même ou la veille faire une prise de sang afin de vérifier si l’état de ses cellules sanguines permet de recevoir la cure. Le médecin l’examine puis fait un compte-rendu des effets secondaires de la cure précédente. En effet, ces effets secondaires ont pu entre-temps disparaître. La prescription peut alors être effectuée, et si besoin, en ajustant les doses et les médicaments associés pour prévenir ou traiter les effets secondaires.

Le jour du traitement de chimiothérapie, le patient est installé sur un lit ou dans un fauteuil confortable. L’infirmière pose alors la perfusion. Une tubulure relie des poches contenant les médicaments jusqu’à l’aiguille spéciale permettant de piquer dans la chambre implantable (en l’absence d’un tel dispositif, il faut en général être hospitalisé(e) et non plus traité(e) en hospitalisation de jour).

Le casque réfrigérant permettant d’éviter la chute des cheveux, effet secondaire possible de la chimiothérapie, n’est pas utilisé ici, d’une part parce que le froid provoque des réactions avec l’oxaliplatine et, d’autre part, parce que la perte des cheveux est très rare avec ce traitement.

Des médicaments seront prescrits pour prévenir les nausées et pour traiter les diarrhées et les mucites (sorte d’aphtes dans la bouche) si le traitement déclenche de telles manifestations. Le médecin peut également ajouter à ces prescriptions des facteurs de croissance stimulant la production de globules et permettant ainsi de compenser la baisse des globules rouges (anémie) ou la baisse des globules blancs (leucopénie).

La chimiothérapie s’étend habituellement sur une durée de 3 à 6 mois (soit 6 à 12 cycles de FOLFOX ou 4 à 8 cycles de XELOX). La durée adaptée sera précisée au patient par le médecin en fonction de la classification TNM de la tumeur et du schéma de chimiothérapie prescrit.

Une baisse de forme et de moral peut survenir assez fréquemment en f in de traitement. Il n’y a pas lieu de s’en inquiéter car cette situation est transitoire.

Que faire avant un cycle de chimiothérapie ?

Avant une cure de chimiothérapie, il faut faire au minimum une prise de sang pour que le médecin s’assure que la numération formule sanguine permette d’administrer le traitement sans risque.

Il faut être attentif aux effets secondaires qui ont suivi un cycle précédent et les signaler au cancérologue, même s’ils n’ont duré que quelques jours, afin qu’il ajuste les doses de chimiothérapie et qu’il prescrive les traitements éventuellement nécessaires pour prévenir et traiter ces effets secondaires.

Un patient doit aussi surveiller son poids, les doses de médicaments en dépendant en partie. Un amaigrissement important peut nécessiter des examens supplémentaires.

Le traitement étant parfois éprouvant, il est préférable de venir accompagné et de ne pas conduire.

Comment et par quelle voie la chimiothérapie est-elle administrée ?

La voie intraveineuse est utilisée pour la plupart des médicaments de chimiothérapie : les plus courants sont le 5-fluorouracile (5-FU), le raltritexed, l’oxaliplatine, l’irinotécan. Les anticorps monoclonaux (bevacizumab, aflibercept, cetuximab, panitumumab) font aussi partie de l’arsenal thérapeutique.

La perfusion de l’oxaliplatine dure 2 heures (elle peut se prolonger en cas d’effets secondaires aigus), celle d’irinotécan 1 heure à 1 heure et demie. En principe, les veines des bras, quand elles sont faciles à perfuser, suffisent pour des perfusions de cette durée.

En revanche, le 5-fluorouracile (5-FU) est plus efficace et très bien toléré quand il est administré en perfusion continue. C’est pourquoi pompes et cathéter central sont nécessaires pour éviter l’hospitalisation. Sans cathéter veineux central, les médicaments doivent être dilués et la quantité de liquide nécessaire oblige à une hospitalisation. Avec un cathéter, tous les médicaments sont plus faciles à administrer.

Des analogues du 5FU sous forme orale (prise de médicament par la bouche) ont été développés, cette voie étant souvent préférée par les patients. Il s’agit de la capécitabine, la plus utilisée, et de la trifluridine/ tipiracil. L’efficacité est globalement la même que celle du 5FU par voie injectable, les effets secondaires un peu différents.

Les indications de ces traitements oraux doivent être suivies à la lettre pour que ces médicaments soient efficaces sans être trop toxiques. Ces traitements requièrent une plus grande implication du patient dans sa propre prise en charge. Cependant, la plupart des médicaments qui leur sont associés sont administrés par voie veineuse.

Dans certaines circonstances, en particulier quand les métastases sont localisées au foie et ne peuvent être enlevées par la chirurgie, une chimiothérapie intra-artérielle hépatique permet, en augmentant la concentration des produits au niveau des métastases et en diminuant celle du sang circulant, d’améliorer l’efficacité et la tolérance de la chimiothérapie. Il s’agit d’une technique qui est réservée à des centres spécialisés où la mise en place des cathéters dans l’artère hépatique peut être faite soit par voie chirurgicale soit par méthode radiologique.

 

Est-il possible de n’être traité que par une chimiothérapie en comprimés ?

Il est beaucoup plus simple d’être traité par des comprimés et d’éviter les contraintes des hospitalisations, même de quelques heures, et celles des cathéters qui ajoutent une cicatrice et nécessitent des pompes portables. Cependant, cette préférence se justifie si le traitement est aussi efficace et aussi bien toléré. Il n’y a que les antimétabolites qui peuvent être administrés par voie orale et leurs effets secondaires ne sont pas réduits par rapport au 5-fluorouracile (5-FU) avec la pompe portable. C’est pourquoi, l’indication des comprimés, essentiellement la capécitabine, ou la trifluridine/tipiracil est surtout réservée aux patients qui tolèrent bien la voie orale, qui sont capables de gérer eux-mêmes leur traitement et qui n’ont pas la nécessité d’avoir un autre produit par voie intra-veineuse.

En dehors de cette situation plutôt rare de ne recevoir qu’un seul médicament, certains patients peuvent préférer la prise orale si elle permet de diminuer la fréquence des hospitalisations de jour et d’éviter la pompe ou le cathéter. Cela peut être possible si le patient a de « bonnes veines » et s’il tolère bien son traitement. C’est pourquoi l’association capécitabine-oxaliplatine (XELOX) a été développée parallèlement au FOLFOX.

Il est impératif avec la capécitabine de prendre ses comprimés matin et soir, à distance des repas, pendant la durée prévue, habituellement 2 semaines sur 3. Il faut que le patient sache interrompre le traitement en cas d’effet secondaire relié au médicament et surtout en parler à son médecin oncologue qui fera si besoin un ajustement de dose. Un autre médicament, le régorafenib, qui n’est pas à proprement parler une chimiothérapie mais une thérapie ciblée, se donne en comprimés.

Une hospitalisation est-elle nécessaire pour recevoir une chimiothérapie ?

La chimiothérapie moderne du cancer colorectal n’implique pas forcément une hospitalisation. La chambre implantable et les pompes portables permettent d’administrer des traitements prolongés sans difficulté. La pompe portable peut être ôtée par une infirmière à domicile.

Certains protocoles peuvent être administrés à domicile, en hospitalisation à domicile (HAD) mais leur nombre est restreint ; par exemple l’oxaliplatine, très souvent prescrit et qui peut entrainer des réactions allergiques, n’est pas administrable à domicile sans surveillance médicale !

La question de l’hospitalisation se pose en l’absence de chambre implantable ou lorsque le patient est fatigué ou qu’il habite trop loin d’un centre pour faire un aller et retour dans la journée.

Hormis les cas où les patients ont de « belles veines », la chambre implantable reste plus confortable que les classiques perfusions au bras. Cependant, certaines chimiothérapies intraveineuses, notamment quand elles sont prescrites sur une courte durée, peuvent se faire sans site implantable. Les traitements par des associations médicamenteuses ne permettent hélas pas aujourd’hui d’éviter l’utilisation de la voie veineuse (le deuxième médicament est lui, toujours administré par cette voie veineuse).

Qu’est-ce qu’une chambre implantable, une pompe portable de chimiothérapie ?

La perfusion de chimiothérapie et de la plupart des thérapies ciblées et des anticorps monoclonaux nécessite la pose d’un dispositif interne (la chambre implantable) relié à une grosse veine centrale par un cathéter, permettant de perfuser de façon prolongée ou d’administrer les traitements intraveineux en toute sécurité. Elle évite l’effet toxique du produit sur des veines de calibre inférieur, comme celles du bras. Elle est particulièrement indiquée lorsque les veines sont fragiles ou inutilisables.

La perfusion de chimiothérapie nécessite également un dispositif externe (poche de perfusion, pompe, pousse seringue, diffuseur) pour stocker et distribuer le produit via une tubulure jusqu’à la chambre implantable.

La chambre implantable (ou cathéter implantable ou port à cath ou PAC) se compose d’une chambre, sorte de petit réservoir surmonté d’un septum (membrane épaisse) et d’un cathéter, fin tuyau qui se f ixe à la chambre. Le cathéter est posé sous anesthésie locale dans la plupart des cas. Il est rare de pouvoir le poser lors de l’opération du côlon ou du rectum car il n’est pas toujours possible de savoir si la chimiothérapie sera nécessaire. La pose de la chambre nécessite une incision de quelques centimètres sur la paroi thoracique entre la clavicule et le sein. Si besoin, elle peut se faire sous anesthésie générale. Le cathéter est glissé sous la peau, de la chambre jusqu’à son entrée dans la veine, au niveau du cou le plus souvent, ou en dessous de la clavicule. L’extrémité du cathéter est introduite dans la grosse veine s’abouchant au cœur, appelée veine cave supérieure. Lors des perfusions, l’infirmière utilise une aiguille spéciale (aiguille de Huber) qui traverse la peau pour se planter dans le septum du réservoir, ce qui est pratiquement indolore et beaucoup plus confortable que la perfusion dans le bras. L’application d’un pansement anesthésique (patch Emla®) permet d’éviter d’éventuelles douleurs locales.

Les avantages de la chambre implantable sont supérieurs à ses inconvénients : elle permet des perfusions continues, les injections sont moins douloureuses et le risque d’extravasation (fuite de produit sous la peau) est très réduit. En cas de perfusion continue, le cathéter est relié à une pompe portable, en général à usage unique et de faible volume, permettant de vivre presque normalement. Bains et douches sont possibles en dehors du traitement car la chambre est bien protégée par la peau.

Cependant la chambre implantable et son cathéter peuvent parfois être à l’origine de complications :

  • des douleurs et un hématome (saignement) peuvent survenir au cours de la pose mais ne durent pas ;
  • une thrombose veineuse (obstruction de la veine dans laquelle est inséré le cathéter par un caillot) qui se traduit par un gonflement du cou et du bras. Elle nécessite la prescription d’anticoagulants pour dissoudre le caillot ;
  • une infection nécessitant la prise d’antibiotiques et parfois le retrait de la chambre ;
  • une obstruction du cathéter obligeant à le désobstruer par des injections ou à changer la chambre.

Qu’est-ce qu’une chimiothérapie intra-artérielle ?

Le foie est le seul organe du corps humain recevant du sang à la fois d’une artère (l’artère hépatique) comme tous les autres organes, mais aussi d’une veine (la veine porte). Cette double vascularisation permet d’utiliser l’artère pour administrer des traitements anticancéreux. De plus les métastases sont en général nourries (oxygène, nutriments…) par l’artère et le foie non tumoral reçoit lui son oxygène et ses nutriments plutôt par la veine porte (60% environ).

Ainsi dans plusieurs tumeurs primitives ou secondaires du foie, les traitements intra-artériels anticancéreux ont été développés. En ce qui concerne les métastases hépatiques d’origine colorectale, 3 modalités intra-artérielles sont possibles :

  • injecter de la chimiothérapie par un cathéter intra-artériel à demeure. Cela nécessite la pose d’une deuxième chambre implantable par voie radiologique le plus souvent (voie chirurgicale possible si une chirurgie est nécessaire par ailleurs) dans l’artère du foie qui sera utilisée pour administrer tout ou partie de la chimiothérapie via ce cathéter ;
  • injecter des microbilles chargées d’une molécule de chimiothérapie (chimio-embolisation) ;
  • injecter des microbilles chargées d’une molécule radioactive appelée Ytrium 90 qui permet une irradiation interne sélective (radio-embolisation)

Ces approches de traitements intra-artériels sont en général réservées aux patients ayant des métastases limitées au foie ou très prédominantes sur le foie et ayant échappé aux traitements conventionnels. Leur(s) intérêt(s) dès le début du traitement reste(nt) à démontrer et des études sont en cours.

Qu’est-ce qu’une « chimiothérapie hyperthermie intra-péritonéale » (CHIP) ?

Certains cancers du côlon ou du rectum, et notamment de l’appendice dans une forme particulière qui s’appelle le pseudomyxome, peuvent donner lieu à un essaimage de cellules tumorales sur le péritoine, dans la cavité abdominale. Le péritoine est une membrane qui recouvre les parois de l’abdomen et recouvre également l’ensemble des viscères digestifs (foie, rate, estomac, intestin, vessie, etc). Cette situation détermine ce que l’on appelle une carcinose péritonéale, c’est-à-dire l’implantation de nodules de tumeurs sur le péritoine. Ces nodules sont indépendants les uns des autres. Cette localisation tumorale nécessite une prise en charge spécifique. Le bilan de ces nodules est complexe et les examens radiologiques, comme le scanner et l’IRM peuvent visualiser certains petits nodules mais pas tous et pas en toutes circonstances. Depuis plusieurs années, un nouveau concept thérapeutique a été développé dans le but de traiter la carcinose péritonéale.

Il s’agit d’une chirurgie étendue, qui est l’élément le plus important du traitement. Elle a pour objectif de retirer l’ensemble de ces lésions tumorales visibles (chirurgie de réduction tumorale maximale). Pour cela, le chirurgien peut être amené à réaliser des destructions des nodules comme sur le foie et à retirer les organes touchés par la maladie comme des parties de l’intestin ou la rate ou le péritoine des parois abdominales. A cette chirurgie, est associée pour traiter les éventuelles lésions tumorales invisibles ou les cellules isolées, une chimiothérapie particulière, appelée CHIP : Chimiothérapie Hyperthermie Intra Péritonéale. Cette CHIP est faite directement dans la cavité abdominale pendant l’opération. La chimiothérapie est délivrée avec un bain qui est chauffé à 42, 43°. Cette CHIP demande un temps d’intervention supplémentaire pour sa réalisation.

L’intervention ainsi réalisée va cumuler une intervention chirurgicale longue (car il faut vérifier l’abdomen dans chacun de ces plans et recoins, ce qui en cas de maladie étendue ou de chirurgie antérieure va durer plus de 5 à 6 heures) et la chimiothérapie par CHIP. Il s’agit donc d’une procédure longue avec le risque d’avoir des complications. Ces complications se situent entre 30 % et 65 % et sont responsables d’environ 15% de reprises opératoires (nouvelle intervention chirurgicale). La mortalité opératoire n’est, en revanche, pas supérieure à celle d’une intervention de chirurgie digestive lourde « classique ».

La reprise de l’alimentation orale s’effectue en moyenne au bout de 7 jours et la durée moyenne d’hospitalisation est de 21 jours. Celle-ci est proportionnelle à l’importance du geste chirurgical et donc à l’importance de la maladie présente, au nombre de sutures digestives réalisées et au nombre de transfusions sanguines. La reprise de l’autonomie demande plusieurs semaines. La qualité de vie revient à son état préopératoire habituellement avant 6 mois.

Quelles sont les associations médicamenteuses utilisées actuellement ?

La chimiothérapie est souvent composée d’une association de médicaments dont le mécanisme d’action est différent, dans le but de multiplier les effets et de diminuer les résistances des cellules cancéreuses. Ces associations ont fait leur preuve lors des essais thérapeutiques.

Les associations les plus répandues reposent sur un antimétabolite, (5-fluorouracile (5-FU) ou capécitabine) combiné avec soit l’oxaliplatine (FOLFOX ou XELOX) [1] [2], soit avec l’irinotécan (FOLFIRI) qui est un inhibiteur de la topo-isomérase 1[3], soit avec les 2[4] et de plus en plus souvent en cas de maladie métastatique, associé à un anticorps monoclonal[5]

Ces traitements sont le plus souvent administrés sur 48 heures toutes les 2 semaines, à l’aide une pompe portable pour le 5-fluorouracile (5-FU) lorsque le patient a une chambre implantable. La capécitabine est administrée par voie orale 2 semaines sur 3.

Dans certains cas les trois médicaments peuvent être utilisés simultanément, c’est le protocole FOLFOXIRI ou FOLFIRINOX.

Les effets secondaires du protocole avec l’oxaliplatine et l’irinotécan sont les toxicités du FOLFOX.

Enfin, les anticorps monoclonaux sont utilisés avec les protocoles de chimiothérapie.

Quels sont les effets secondaires de la chimiothérapie ?

Les effets secondaires ne sont pas constants. De plus, il existe des traitements efficaces pour les stopper ou les atténuer.

Le 5-fluorouracile (5-FU) (antimétabolite : voir la définition à la question 34) donné en perfusion via la chambre implantable est la chimiothérapie la mieux tolérée. Les effets secondaires, rarement sévères (5 à 10 %), sont dominés par des troubles digestifs : nausées, diarrhée, mucites (aphtes dans la bouche parfois accompagnés d’une inflammation le long du tube digestif). Le changement du goût des aliments n’est pas spécifique à cet antimétabolite. Le syndrome main-pied qui se manifeste par des rougeurs sensibles des mains et des pieds puis parfois par des crevasses est rare ; de même, la baisse des globules blancs et la perte des cheveux régressent à l’arrêt de la prise du médicament. Certains patients ont une conjonctivite et de petits saignements de nez. Il existe néanmoins une contre-indication à l’administration de cet antimétabolite en perfusion : les douleurs thoraciques d’origine cardiaque (angine de poitrine) non contrôlées. Si ces douleurs surviennent, parfois en l’absence d’antécédents (moins de 1 % des cas), il faut alors arrêter les perfusions.

Il existe d’autres antimétabolites. La capécitabine a l’avantage de pouvoir être prise par voie orale. Il faut, par contre, bien suivre les recommandations concernant les doses car la diarrhée et le syndrome main-pied sont plus fréquents et peuvent être sévères (chez environ 10 % des patients). Le trifluridine tipiracil est également pris par voie orale. Sa principale toxicité est d’ordre hématologique; elle engendre une diminution des globules blancs notamment des polynucléaires neutrophiles qui devront être contrôlés avant chaque cycle de traitement.

L’oxaliplatine (dérivé du platine bloquant la réplication des chromosomes) est toujours donné en association avec un antimétabolite. Il majore les effets secondaires digestifs et la baisse des globules et ajoute des toxicités spécifiques : les réactions au froid (crampes, douleurs) pouvant pendant la perfusion être prévenues, surtout l’hiver. Il faut alors porter des gants, un cache-col, éviter de mettre les mains dans le réfrigérateur ou le congélateur : en bref, éviter tout contact avec le froid. Plus tardivement, l’atteinte des nerfs sensitifs atteignant plus les pieds que les mains peut, dans les cas les plus sévères, gêner la vie quotidienne (difficulté à écrire, à tenir les objets, à marcher ; il vaut mieux éviter les échelles et les escabeaux). Cette atteinte est heureusement réversible et doit conduire à l’arrêt (parfois seulement temporaire) de ce produit. Ce traitement peut aussi être à l’origine d’allergies. De nouvelles modalités d’administration de ce traitement (limitation du nombre de cures) permettent le plus souvent de réduire certains de ces effets secondaires.

Les effets secondaires de l’inhibiteur de la topo-isomérase 1, l’irinotecan, sont la diminution des globules blancs avec un risque infectieux, la mucite, les nausées, l’apparition d’une diarrhée parfois sévère et d’une alopécie inconstante (perte des cheveux temporaire dans 60 % des cas en 1ère ligne, entre 30 et 40 % en deuxième ligne).

Avec les chimiothérapies, les accidents vasculaires (phlébite, embolie) sont possibles mais rares.

Tous ces effets secondaires ne sont pas constants. Certains patients n’en subissent aucun, d’autres rarement. Des traitements efficaces permettent aujourd’hui de les stopper ou de les atténuer. La présence d’effets secondaires ne signifie pas que le traitement est inefficace.

Comment gérer les effets secondaires ?

La première chose, c’est d’en parler aux infirmières et aux médecins afin de les traiter et les prévenir. Il existe des médicaments efficaces pour traiter une diarrhée, une mucite (bains de bouche) ou des nausées (antiémétiques : produits contre les vomissements). Si cela ne suffit pas, il faut rechercher une autre cause associée. Une diarrhée sévère peut entraîner une déshydratation et nécessiter une hospitalisation.

Il faut surtout être attentif aux complications hématologiques éventuelles. La chimiothérapie fait parfois diminuer le nombre de globules rouges et le taux d’hémoglobine : c’est l’anémie qui se traduit par une fatigue ou un essoufflement. Cette anémie peut aussi être due à la maladie. Elle peut être traitée par transfusion quand elle est importante ou par érythropoïétine (facteur de croissance des globules rouges, injectable en intramusculaire) qui agit plus lentement.

La baisse des plaquettes (thrombopénie) peut survenir surtout avec l’oxaliplatine. Cette diminution du nombre de plaquettes favorise la survenue de saignements mais n’a le plus souvent pour seule conséquence que de faire reporter la cure et de réduire les doses.

La baisse des globules blancs (leucopénie), et plus particulièrement des polynucléaires neutrophiles (neutropénie), nécessite une prise en charge particulièrement rigoureuse. La diminution des globules blancs entraîne un risque infectieux surtout lorsque les polynucléaires sont inférieurs à 500 par mm3. Cette situation est, le plus souvent, sans conséquence, mais il faut, et cela d’une façon plus générale, avoir une hygiène parfaite et notamment un lavage fréquent des mains. Il faut donc être vigilant au signe d’appel qui est la fièvre.

En cas de fièvre, il faut faire, sans délai, une prise de sang pour vérifier le taux de globules blancs. S’il est abaissé, le médecin traitant doit examiner le patient et, en l’absence de signe de gravité, lui prescrire des antibiotiques à prendre à la maison ou, s’il craint une infection plus grave, le faire hospitaliser pour un traitement antibiotique par voie intraveineuse.

Une diarrhée associée à la baisse des globules blancs après l’administration de l’irinotecan constitue une urgence et nécessite souvent l’hospitalisation. La prescription de facteurs de croissance des globules blancs appelés G-CSF (Granulocyte-Colony Stimulating Factor) permet parfois d’éviter cette complication car ces médicaments sont capables de stimuler la moelle osseuse qui fabrique les globules blancs.

En cas de gonflement douloureux du cou ou du bras, il peut s’agir d’une thrombose (obstruction par un caillot sanguin) de la veine dans laquelle est placé le cathéter. Il faut alors consulter en urgence. Le médecin prescrira une échographie des vaisseaux du cou avant d’administrer des anticoagulants.

La chimiothérapie s’accompagne parfois d’une fatigue d’une durée variable suivant le début du traitement. Cette fatigue ne doit pas, en principe, avoir trop d’impact sur le mode de vie. Dans le cas contraire, il faut en parler au médecin généraliste ou au cancérologue, afin qu’il puisse vérifier qu’il ne s’agit pas d’un problème associé (fièvre, anémie, dépression, etc.). Si le moral baisse, il ne faut pas hésiter à se confier à un médecin, à un/une psychologue ou contacter une association de patients, leur disponibilité et leur expérience étant précieuses.

Les thérapies ciblées

Thérapies ciblées : quelles significations ?

Parmi les nouveaux médicaments (médicaments mis sur le marché depuis moins de 15 ans), sont arrivées les thérapeutiques moléculaires ciblées. On n’inclut pas dans les thérapies ciblées les immunothérapies qui sont traitées dans une autre question.

Les thérapeutiques moléculaires ciblées sont des médicaments qui inhibent certains mécanismes à l’origine des cancers. Ces mécanismes ont été découverts grâce à l’essor de la biologie moléculaire.

Ces « thérapies ciblées » sont de nouvelles familles de produits dirigés contre une cible moléculaire, qui visent à freiner ou à bloquer la croissance de la cellule cancéreuse, en l’affamant, en provoquant sa mort, en dirigeant le système immunitaire contre elle ou en l’incitant à redevenir normale. Ils se divisent en deux grandes classes, les anticorps monoclonaux, qui inhibent les récepteurs membranaires ou circulants et les petites molécules qui inhibent la signalisation intracellulaire.

Cinq anticorps monoclonaux font partie de l’arsenal thérapeutique, ayant démontré qu’ils prolongeaient la vie des patients.

Quelles sont les différentes thérapies ciblées ?

Les anticorps monoclonaux

Les anticorps monoclonaux ont tous en commun d’être administrés par voie intraveineuse, le plus souvent avec une chimiothérapie.

Cinq anticorps sont actuellement utilisés pour traiter le cancer colorectal.

Les anti-VEGF (Vascular Endothelial Growth Factor) ou anti-corps anti-angiogenèse :

  • Le bevacizumab est un anticorps dirigé contre un facteur de croissance : le VEGF (Vascular Endothelial Growth Factor). C’est un inhibiteur de l’angiogenèse c’est-à-dire de la vascularisation nécessaire à la croissance des tumeurs. Il a montré son efficacité en traitement de première et de seconde intention du cancer colorectal métastatique en augmentant la durée d’activité et l’efficacité de la chimiothérapie. Ses effets secondaires principaux sont une augmentation de la tension artérielle, une protéinurie (libération de protéines en grande quantité dans les urines dans moins de 1% des cas) et de rares, mais graves, perforations intestinales (il faut alors consulter rapidement en cas de douleur abdominale) et thromboses artérielles (accident vasculaire). Sa tolérance est cependant très bonne pour la grande majorité des patients. Il est administré en moins d’1 heure toutes les 2 ou 3 semaines.
  • L’ aflibercept, ou VEGF Trap, est une protéine de fusion construite avec des anticorps dirigée contre le VEGF et d’autres facteurs de l’angiogenèse. C’est donc aussi un inhibiteur de l’angiogenèse. Il a montré son efficacité en traitement de seconde intention du cancer colorectal métastatique en augmentant la durée d’activité et l’efficacité de la chimiothérapie de type FOLFIRI (5 FU, Acide folinique et irinotecan) après une première ligne associant oxaliplatine et fluoropyrimidines (5FU ou capécitabine). Ses effets secondaires principaux sont similaires à ceux du bevacizumab et l’aflibercept augmente modérément la toxicité de la chimiothérapie (neutropénie et diarrhée).
  • Le ramucirumab est un anticorps qui ne se fixe pas au VEGF mais à son récepteur le VEGF-R2. Il a le même profil de tolérance ou d’efficacité que les 2 précédents mais n’est à ce jour pas remboursé en France.

Les anti-EGFR ou anti-récepteurs de l’EGF (Epidermal Growth Factor) :

  • Le cetuximab est un anticorps dirigé contre le récepteur d’un autre facteur de croissance situé sur la membrane des cellules cancéreuses : l’EGF (Epithelial Growth Factor). Il n’est actif que si la tumeur n’a pas de mutation des gènes RAS (KRAS et NRAS qui sont mutés dans 50% des cas). Il est disponible pour traiter les cancers colorectaux métastatiques, soit en première intention en association à une chimiothérapie, soit en cas d’échec de traitement antérieur. Il peut s’utiliser soit en monothérapie, soit en association avec une chimiothérapie. Ses effets secondaires sont dominés par une éruption cutanée qui ressemble à de l’acné qui s’améliore en 5 à 6 semaines et qui peut être diminuée par la prescription d’antibiotiques (doxicycline) à titre préventif. Il peut aussi donner une sécheresse de la peau et des inflammations (péri-onyxis), au niveau des ongles, des pieds et des mains qui peuvent être gênants pour certains patients. Il peut donner des allergies et des réactions lors des premières injections mais cet effet secondaire est rare. Il est administré toutes les semaines ou toutes les 2 semaines.
  • Le panitumumab, est un autre anticorps, également dirigé contre le récepteur de l’EGF. Comme le cetuximab il a fait aussi la preuve de son efficacité en l’absence de mutation des gènes RAS au niveau de la tumeur des patients. Il est d’origine humaine, ce qui explique qu’il ne donne qu’exceptionnellement des allergies et peut être administré toutes les 2 semaines. Son efficacité avec la chimiothérapie de première intention a été établie avec l’oxaliplatine (FOLFOX) et en seconde intention avec l’irinotécan (FOLFIRI). En cas d’échec de traitement antérieur, il peut être efficace en monothérapie, ou en association avec une chimiothérapie à base d’irinotécan.

Les anticorps monoclonaux ont fait l’objet de grandes études en situation adjuvante (après la chirurgie du cancer), associés à la chimiothérapie, mais les résultats montrent qu’ils ne diminuent pas la fréquence des rechutes et n’ont donc pas d’indication dans cette situation.

Les petites molécules

Ce sont le plus souvent des inhibiteurs d’enzymes, les tyrosines kinases, spécifiques des voies de signalisation intracellulaire qui vont du récepteur à leur cible. Ces petites molécules ont l’avantage de pouvoir être prises par voie orale. Elles inhibent aussi le récepteur à l’EGF (Endothelial Growth Factor) et l’angiogenèse.

Dans cette catégorie, le régorafénib a obtenu son autorisation de mise sur le marché dans le cancer colorectal. Ce médicament inhibe la tyrosine kinase ciblant particulièrement des récepteurs de l’angiogénèse (VEGF) mais également de nombreuses autres cibles. Il a démontré son intérêt en cas de stade métastatique avancé, en cas d’échec des autres traitements. La toxicité du regorafénib peut donner une inflammation de la plante des pieds et des mains avec parfois une hyperkeratose, une diarrhée, de la fatigue et parfois de l’hypertension artérielle. Les effets secondaires apparaissent très vite (moins de 7 jours) et peuvent nécessiter de diminuer les doses prescrites. Si le regorafénib est choisi par le médecin il faut qu’il voie son patient régulièrement en consultation pour en surveiller la tolérance.

L’encorafenib est un deuxième inhibiteur de kinase, qui a obtenu son autorisation de mise sur le marché en association avec le cetuximab (anti-corps anti-EFGR) face à un échec d’une première ligne de chimiothérapie en cas de cancer colorectal métastatique avec tumeur ayant la mutation de BRAF. Les effets indésirables les plus fréquents rapportés avec l’encorafenib sont : une inflammation de la plante des pieds et des mains, avec parfois une hyperkeratose, une fatigue, un rash et parfois une sécheresse cutanée avec prurit et parfois des arthralgies.

Les progrès de la biologie moléculaire et l’étude des mécanismes de résistance aux traitements permettent de découvrir d’autres cibles que l’on pourra atteindre avec des thérapeutiques ciblées. La vaccination ou la thérapie génique n’ont pas montré actuellement les mêmes espoirs que ces traitements ciblés.

Quel est l’intérêt de rechercher les mutations de certains gènes dans la tumeur (gènes KRAS, NRAS, BRAF et HER2) ?

Des mutations des gènes KRAS et NRAS (gènes dit RAS) sont fréquemment observées dans les cancers du côlon et du rectum. Ainsi, environ 50 % des cancers colorectaux portent une mutation activatrice des gènes RAS entraînant une activation constitutive de la voie de signalisation EGFR. Une mutation de RAS (KRAS ou NRAS) est associée à une inefficacité des traitements dits anti-EGFR (cetuximab et panitumumab). Ces traitements n’ont un intérêt qu’en cas de maladie avec des métastases. Il est maintenant établi que seuls les patients ayant une tumeur avec des gènes RAS non-mutés (KRAS ou NRAS) surtout s’il s’agit d’une tumeur située au niveau du côlon gauche, peuvent bénéficier d’un traitement par anticorps anti-EGFR. La présence ou l’absence de mutation des gènes RAS est donc devenue un critère essentiel pour le choix du traitement des patients atteints d’un cancer colorectal au stade métastatique.

La mutation BRAF est actuellement recherchée en cas de cancer colorectal avec des métastases (la fréquence est de 8%), dans le cas de présence de cette mutation de BRAF. L’association du cetuximab (anti-corps anti-EGFR) avec l’encorafanib a montré son efficacité et obtenu son autorisation de mise sur le marché en cas d’échec d’une première ligne de traitement.

Est-ce que l’on peut prédire l’efficacité d’un traitement ?

De plus en plus souvent, grâce aux progrès de la recherche, en particulier de la biologie moléculaire et de la génétique, on peut traiter plus efficacement en proposant un traitement personnalisé, adapté à chaque patient et à sa tumeur.

La biologie moléculaire ainsi que l’immuno-histochimie permettent non seulement de découvrir de nouvelles cibles et de nouveaux médicaments mais aussi de savoir si un traitement va être actif. Comme évoqué aux questions 49 et 50, certaines mutations des cellules tumorales peuvent permettre :

  • de prédire que des anticorps anti EGFR (cetuximab et panitumumab) ne seront pas efficaces en cas de mutations RAS (KRAS ou NRAS),
  • de prédire que l’association encorafanib et cetuximab peut être efficace en cas de mutations de BRAF,
  • de prédire que des médicaments anti-HER2 peuvent être efficaces en cas d’amplification/surexpression du gène de HER2,
  • de prédire l’efficacité de l’immunothérapie en cas de tumeur dite MSI /dMMR.

La recherche d’une instabilité des petits fragments d’ADN appelés microsatellites (MSI) est particulièrement utile dans les stades II (maladie locale importante mais non métastatique et sans envahissement des ganglions). Les patients dont les tumeurs sont MSI ne doivent pas être traités en monothérapie par le 5-FU ou la capécitabine en situation adjuvante. En effet cela n’améliore pas le taux de guérison qui est, sans chimiothérapie, très élevé (supérieur à 90%). Cette même anomalie (MSI) chez les patients ayant des métastases (stade IV) est rare (environ 4% des patients avec des métastases de cancers colorectaux) et est un élément qui semble prédire une bonne efficacité des traitements appelés immunothérapie. Elle doit donc aussi être recherchée aujourd’hui chez les patients porteurs de métastases.

La génétique, aussi appelée oncogénétique quand elle concerne les tumeurs, est aussi de plus en plus utile.

La recherche dite translationnelle qui recherche des facteurs pronostiques (ne traiter que les patients qui en ont besoin et adapter le traitement à la gravité) et les facteurs prédictifs (qui prévoient qu’un traitement a une forte probabilité de marcher) est très importante. Elle peut aussi être aidée par le développement des signatures génomiques. Des tests ont été développés pour mieux identifier les stades II qui doivent être traités. L’enjeu personnel et économique est considérable mais cela reste encore du domaine de la recherche. Enfin de nouvelles données sur l’ADN tumoral circulant (ADN tumoral relargué dans le sang par les cellules tumorales) semblent suggérer que l’existence d’ADN tumoral circulant pourrait prédire la rechute, et donc permettre en partie de mieux sélectionner les patients opérés d’un cancer colique de stade II ou III ayant besoin d’une chimiothérapie adjuvante.

Quelle est la place de l’immunothérapie dans le cancer du côlon et du rectum avec métastases ?

Le système immunitaire a pour rôle de protéger l’organisme. Il est composé d’un ensemble de cellules ; les principales sont les lymphocytes et les cellules dendritiques dont la fonction est de lutter contre les bactéries ou les virus, mais également contre les cellules cancéreuses. Les cellules cancéreuses parviennent à déjouer le système immunitaire pour ne pas être reconnues comme des cellules étrangères ou anormales. Les mécanismes de défense de l’organisme sont alors incapables de repérer ces cellules tumorales qui, en développant certains récepteurs à leur surface, arrivent à paralyser le système immunitaire antitumoral et les cellules cancéreuses peuvent ainsi proliférer.

L’immunothérapie ne vise pas directement la tumeur. Elle agit principalement sur le système immunitaire du patient pour le rendre apte à attaquer les cellules cancéreuses. L’immunothérapie notamment par des anticorps monoclonaux, consiste à permettre aux lymphocytes T de reconnaitre les cellules tumorales pour les détruire. Le principe est d’empêcher la cellule tumorale de paralyser le lymphocyte T par la liaison PD1-PDL1. Elle repose sur les anticorps monoclonaux, notamment les inhibiteurs de points de contrôle que l’on appelle les anticorps anti-PD1 ou anti-PDL1 et ou anti-CTL4. Les anticorps anti-PD1 ou anti-PDL1 permettent de casser cette liaison et de libérer les lymphocytes, qui peuvent alors attaquer la tumeur. Les anticorps anti-CTLA4, eux renforcent l’activité du système immunitaire et les lymphocytes cytotoxiques redevenus fonctionnelles. Ces traitements ont été développés pour rétablir une réponse immunitaire adaptée. Ces anticorps monoclonaux sont injectés par voie intraveineuse.

Certains anticorps monoclonaux anti-PD1, anti PDL1 ou antiCTL4 ont prouvé leur efficacité dans le mélanome malin, le cancer du poumon ou le cancer du rein. Ces traitements ont obtenu en Europe leurs autorisations de mise sur le marché (AMM), dans ces indications. Cependant ce type de traitement n’est pas efficace chez tous les patients car il n’existe pas de bon test pour prédire l’efficacité de ce type de médicament. Certains tests effectués sur des prélèvements de tumeurs peuvent aider comme l’expression de la cible de ces anticorps à savoir PD1 et PDL1 mais ont des limites car ils ne permettent pas de définir avec précision la population chez qui le traitement sera efficace.

Chez les patients ayant un cancer colorectal métastatique, les essais thérapeutiques associant des anticorps monoclonaux anti-PD1, anti-PDL1 ou anti-CTL4 n’ont pas montré d’efficacité, sauf chez une catégorie de patients avec une tumeur colorectale ayant un profil biologique très particulier. Il s’agit des patients avec un cancer colorectal dit Micro Satellite Instable (MSI) par opposition à ceux dits Micro Satellite Stable (MMS), c’est-à-dire un cancer ayant un déficit de la réparation de l’ADN et défini comme déficient Mismatch Repair (dMMR), par opposition à ceux dit proficient Mismatch Repair. Quatre à cinq % des patients pris en charge pour un cancer colorectal métastatique ont cette forme MSI/dMMR. Cette forme particulière de cancer colorectal survient soit dans un contexte héréditaire de syndrome de Lynch (syndrome de prédisposition familiale dit HNPCC, voir question 6), soit spontanément sans environnement particulier avec une incidence qui augmente avec l’âge.

Ces tumeurs MSI/dMMR sont très particulières avec une réaction importante du système immunitaire qui n’arrive pas à enrayer la progression de la maladie métastatique. Cette anomalie est facile à repérer en analysant un fragment de tumeur et cela est fait partout en France. Pour ces patients avec cancer MSI, l’immunothérapie par anticorps anti PD1, PDL1 ± CTLA4, est fréquemment efficace et modifie radicalement la prise en charge.

Le diagnostic de cette forme dite MSI/dMMR se fait grâce à l’analyse de la tumeur, soit par immunohistochimie (dMMR ou pMMR), soit par des techniques de biologie moléculaire(MSI ou MSS). Cette détermination fait maintenant partie des tests réalisés en routine, nécessaires à la prise en charge d’un patient avec un cancer colorectal afin d’adapter au mieux son traitement.

Depuis plusieurs années, ces anticorps monoclonaux d’immunothérapie (anti-PD1/PDL1 ± anti-CTL4) ont été évalués chez des patients porteurs d’un cancer colorectal métastatique MSI/dMMR en première ligne de traitement ou ayant échappé aux traitements standards. Les résultats sont très prometteurs : un nombre important de patients traités, ayant un contrôle de leur maladie sur de longues durées, dont certains en rémission complète.

Le premier anticorps ciblant l’immunothérapie arrivé sur le marché en France en 2021 est le pembrolizumab (anti-PD1 ) pour les patients avec CCR métastatique MSI/dMMR en première ligne de traitement et en monothérapie. L’association de nivolumab (anticorps anti-PD1) et d’ipilumumab (anticorps anti-CTLA4) en situation de résistance ou d’intolérance aux traitements standards pour des patients avec CCR métastatique MSI/dMMR a également obtenu son autorisation de mise sur le marché en Europe depuis juin2021, mais sans le remboursement en France (information en date du second trimestre 2022 correspondant à l’actualisation de ce guide).

Des essais thérapeutiques sont en cours avec des anticorps contre d’autres cibles du système immunitaire ou avec d’autres types de médicaments dont la chimiothérapie, mais également des vaccins dans l’espoir de disposer de l’immunothérapie pour traiter les patients ayant un cancer colorectal métastatique au-delà de ceux qui sont MSI/ dMMR.

Les anticorps anti-PD1, anti-PDL1 et anti-CTL4 peuvent avoir des effets indésirables à type d’auto-immunité, c’est-à-dire provoquant la production d’auto-anticorps contre certains tissus normaux. Globalement la toxicité de ce type de médicament peut survenir à quelques jours ou quelques semaines après le début du traitement, parfois plusieurs mois après le début du traitement. Les toxicités auto-immunes les plus fréquemment observées et les plus bénignes sont la fatigue et le syndrome pseudo-grippal. Il y a également des toxicités endocriniennes à type de dysthyroïdie (hyper puis hypothyroïdie) ou des hépatites, dont le diagnostic sera fait grâce à une prise de sang ou des colites dont le symptôme est la diarrhée. De fait, toute diarrhée doit être surveillée de façon rapprochée pour éviter que cela ne dégénère en toxicité sévère. Plus rarement peuvent également survenir des toxicités plus sévères comme des pneumopathies interstitielles auto-immunes, des pancréatites, des inflammations des muscles (myosite) ou des articlations (polyarthrites).

Actuellement, un patient sous immunothérapie par anti-PD1 ou PDL1 ± anti-CTL4 reçoit une perfusion de 30 minutes à une heure toutes les 2 à 6 semaines, le schéma d’administration dépendant des anticorps utilisés et ce, de façon prolongée (au moins un an), tant qu’il répond au traitement, la durée optimale du traitement étant à ce jour inconnue. Si le patient présente une toxicité importante, on peut être amené à suspendre ou à arrêter le traitement. En pratique, comme ces médicaments peuvent donner une toxicité avec un spectre très large, tout événement indésirable pouvant survenir sous traitement doit être rapidement rapporté au médecin.

La radiothérapie

À quoi sert la radiothérapie ?

La radiothérapie a pour objectif de détruire les cellules cancéreuses tout en préservant au maximum les cellules des tissus sains. Elle utilise des rayonnements de haute énergie (rayons X) produits par des accélérateurs de particules (radiothérapie externe). Ces rayonnements peuvent être orientés vers des zones très précises du corps.

La radiothérapie est utilisée dans le traitement de plus des 2/3 des cancers, le plus souvent en association avec la chirurgie et les traitements médicaux. Son objectif principal est d’irradier précisément la tumeur afin de la détruire ou de diminuer le risque d’échec de la chirurgie. La radiothérapie joue un rôle important dans le traitement des cancers du rectum.

La radiothérapie peut être utilisée seule ou en association. Dans le cadre du traitement du cancer du rectum, elle s’associe aux autres méthodes thérapeutiques. Dans la majorité des cas, elle est réalisée avant la chirurgie, de façon à réduire le risque de récidive locale. Elle est souvent associée à une chimiothérapie administrée de manière simultanée afin d’augmenter l’efficacité des rayons X sur les cellules tumorales (chimiothérapie concomitante) et de manière séquentielle (traitement néoadjuvant).

La radiothérapie peut être utilisée seule ou en association. Dans le cadre du traitement du cancer du rectum, elle s’associe aux autres méthodes thérapeutiques. Dans la majorité des cas, elle est réalisée avant la chirurgie, de façon à réduire le risque de récidive locale. Elle est souvent associée à une chimiothérapie administrée de manière simultanée afin d’augmenter l’efficacité des rayons X sur les cellules tumorales (chimiothérapie concomitante) et de manière séquentielle (traitement néoadjuvant).

Pourquoi recevoir des rayons avant l’intervention ?

Le traitement du cancer du rectum repose essentiellement sur la chirurgie. Cette dernière n’est pas systématiquement associée à une radiothérapie pour les petites tumeurs. Elle l’est en revanche lorsque la tumeur dépasse nettement la paroi du rectum, s’associe à des métastases ganglionnaires, ou si la tumeur est située très bas près du canal anal. Dans ces cas, le pourcentage de récidives locales après chirurgie seule est plus important.

La réalisation d’une radiothérapie avant la chirurgie (radiothérapie dite préopératoire) permet de réduire le volume de la tumeur, de détruire les cellules tumorales (notamment celles qui sont présentes près des limites de la zone qui sera enlevée chirurgicalement) et de diminuer ainsi les risques de récidive.

La radiothérapie préopératoire a par ailleurs l’avantage de diminuer les risques de complications liées à l’irradiation car elle est pratiquée sur des tissus dont la vascularisation n’a pas été modifiée par la chirurgie.

La radiothérapie préopératoire peut être délivrée selon 2 modalités :

  • de façon « concentrée », c’est-à-dire sur une durée d’1 semaine ; l’intervention chirurgicale est alors réalisée dans les 10 jours qui suivent la fin de l’irradiation ou 6 à 8 semaines après,
  • sur une durée de 5 semaines et la chirurgie est pratiquée 6 à 8 semaines plus tard. Dans ce dernier cas, une chimiothérapie est le plus souvent associée à la radiothérapie (chimiothérapie concomitante) pour la rendre plus efficace.

Plusieurs protocoles de chimiothérapie sont utilisés. Le plus souvent, il s’agit d’une chimiothérapie orale (capécitabine) qui est administrée tous les jours de la radiothérapie (pas le week-end ni les jours fériés) matin et soir, 30 minutes après les repas, en respectant bien un intervalle de 12 heures entre les prises.

Pourquoi recevoir des rayons si le chirurgien a retiré toute la tumeur ?

La chirurgie est utilisée en première intention dans le traitement des cancers de petit volume lorsqu’elle est susceptible de permettre, à elle seule, le contrôle de la maladie.

La portion d’intestin enlevée lors de l’intervention chirurgicale est analysée au microscope. Il arrive, dans de rares cas, que la tumeur se révèle plus évoluée que ne le laissait suspecter le bilan préopératoire. Ceci signifie qu’elle infiltre le tissu qui entoure le rectum en profondeur, que des ganglions sont envahis ou que la marge de sécurité autour de la tumeur est insuffisante. Dans ces cas, il est possible que des cellules cancéreuses persistent dans le petit bassin (pelvis). Une radiothérapie dite postopératoire -parce qu’elle suit l’intervention chirurgicale- peut alors être prescrite de façon à diminuer le risque de récidive pelvienne. Elle est pratiquée durant 5 à 6 semaines, le plus souvent associée à une chimiothérapie (chimiothérapie concomitante).

Quelle partie du corps va être irradiée ?

Le volume irradié est défini pour chaque patient de manière personnalisée sur le scanner de préparation de la radiothérapie (scanner de centrage ou de simulation) en s’aidant de l’imagerie réalisée au préalable, surtout l’IRM qui permet de bien visualiser la tumeur. Il englobe le rectum et ce qui est appelé le mésorectum, c’est-à-dire le tissu qui entoure le rectum ainsi que les aires ganglionnaires situées dans le pelvis. Le canal anal ne sera irradié que pour les tumeurs situées dans le bas du rectum.

Le volume traité englobe souvent une partie de la prostate chez l’homme et une partie de l’utérus ou du vagin chez la femme. Les ovaires reçoivent une dose d’irradiation qui entraîne une ménopause chez les femmes non ménopausées. Les techniques modernes de radiothérapie permettent de protéger en grande partie l’intestin grêle et la vessie pour limiter la dose reçue par ces organes et réduire le risque d’effets secondaires.

Quelles sont les autres indications de la radiothérapie ?

La radiothérapie peut être utile dans le traitement de certaines métastases situées au niveau du cerveau, des os ou des ganglions. Elle permet de calmer des douleurs ou de diminuer le risque de fractures.

Ces localisations métastatiques sont relativement rares.

Les progrès de la radiothérapie (voir question 68) élargissent les indications de la radiothérapie au traitement curatif de métastases qui ne sont pas accessibles à la chirurgie, au niveau des poumons et du foie par exemple. Cette technique spéciale s’appelle radiothérapie stéréotaxique.

Comment se passe la radiothérapie ?

La radiothérapie externe ne nécessite pas d’hospitalisation. En cas de chimiothérapie concomitante, celle-ci est prise le plus souvent à domicile quand il s’agit d’un traitement oral. S’il s’agit d’une perfusion, la chimiothérapie est réalisée le plus souvent en hôpital de jour (hospitalisation qui dure moins d’1 journée).

Lors de la première consultation, l’oncologue radiothérapeute explique le principe du traitement, sa durée, le rythme des séances et les effets indésirables possibles.

Plusieurs étapes préalables sont nécessaires à la réalisation du traitement proprement dit :

  • la première étape consiste non seulement à déterminer la position dans laquelle doit être placé le patient lors des séances d’irradiation (sur le dos généralement, parfois sur le ventre) mais aussi à effectuer un repérage précis de la zone à traiter par radiothérapie. Ce repérage est en général réalisé grâce à un scanner et permet de voir le rectum, les ganglions, la vessie, la prostate ou le vagin, les ovaires et l’utérus. À partir des images de ce scanner, le médecin radiothérapeute va déterminer tous les éléments techniques nécessaire au bon déroulement de l’irradiation ;
  • l’étape suivante consiste à placer des repères sur la peau (traits au stylo-feutre ou points de tatouage). Ils servent à repositionner le patient exactement de la même manière à chaque séance. Ces repères, indispensables dans le cadre du traitement, ne doivent pas être effacés lors de la toilette ;
  • la troisième étape s’appelle la « mise en place » : elle est réalisée sur l’accélérateur avant la première séance de traitement. Elle consiste à simuler une séance de radiothérapie et à effectuer des contrôles radiologiques pour vérifier le bon positionnement des faisceaux d’irradiation avant le début des soins. De tels contrôles sont répétés lors des séances de traitement ultérieures, généralement au moins 1 fois par semaine, voire plus selon le degré de précision de la technique utilisée.

La radiothérapie externe comporte plusieurs séances successives, en général 5 séances par semaine pendant 1 à 5 semaines. Ces dernières sont réalisées par des techniciens en radiothérapie (manipulateurs radio). À chaque séance, le technicien installe le patient sur la table de traitement de l’accélérateur puis effectue les vérifications nécessaires. Il est important que la vessie soit toujours pleine à peu près de la même manière à chaque séance afin que l’intestin grêle situé au-dessus de la vessie soit le moins possible dans la zone irradiée. Des instructions vous seront données dans ce sens. Le temps de présence dans le service de radiothérapie est de moins d’1 heure par jour.

Lors de la radiothérapie proprement dite, le patient est seul dans la salle de traitement, sous surveillance audiovisuelle. Le traitement lui-même dure 1 minute environ. Il est indolore. Il est très important de rester le plus immobile possible pour que le traitement soit d’une qualité optimale. Après la séance, il n’y a pas de radioactivité dans le corps car les rayons traversent le corps et en ressortent.

Quels sont les effets secondaires indésirables possibles pendant la radiothérapie et comment les atténuer ?

Pendant le traitement, une consultation hebdomadaire avec le médecin oncologue radiothérapeute est indispensable. Cette consultation peut être plus fréquente si l’état de santé du patient le nécessite. Tout problème doit être signalé au médecin ou au (à la) technicien(ne) de radiothérapie.

Les effets indésirables dépendent de la dose délivrée et du volume traité, mais varient aussi d’un patient à l’autre. Les principaux effets secondaires en cours de traitement sont :

  • la fatigue. Fréquente, elle est autant liée aux déplacements quotidiens qu’à la radiothérapie elle-même. La chimiothérapie concomitante la majore. Des périodes de repos ou de sieste dans la journée sont recommandées en cas de besoin ;
  • l’anxiété est un phénomène normal. Pour surmonter ces moments difficiles, l’aide d’un psychologue ou d’un psychiatre peut être utile ainsi qu’un soutien auprès d’associations d’anciens malades qui ont vécu une situation identique ;
  • l’irritation de la peau. À partir de la troisième ou quatrième semaine de traitement, la peau peut parfois devenir rouge et sensible, avec parfois des démangeaisons comme lors d’un coup de soleil. Ceci ne se produit que dans la zone irradiée (pli inter fessier le plus souvent) et ces désagréments sont le plus souvent minimes et transitoires. Pour les limiter, il est conseillé de porter des sous-vêtements en coton et d’utiliser un savon surgras pour la toilette. Il faut éviter les bains en piscine et n’utiliser que les crèmes recommandées par l’oncologue radiothérapeute ;
  • les nausées, parfois associées à des vomissements, sont liées à la chimiothérapie concomitante. Elles sont rares avec ce type de traitement mais il faut cependant les signaler à l’oncologue radiothérapeute car elles peuvent être prévenues par des médicaments ;
  • la rectite radique est une inflammation du rectum secondaire à l’irradiation. Elle se traduit par des douleurs locales, une augmentation de la fréquence des selles qui sont parfois liquides et par l’émission de glaires. Des poussées hémorroïdaires peuvent être associées à ces signes. Il est fréquent qu’apparaisse aussi une diarrhée qui peut être maîtrisée grâce à des traitements antidiarrhéiques classiques associés à des mesures diététiques ;
  • la cystite est rarement observée lors des traitements des cancers du rectum par radiothérapie. Elle se traduit par des brûlures pendant la miction (l’acte d’uriner) et par des envies d’uriner plus fréquentes. Elle se traite médicalement, après avoir vérifié l’absence d’infection urinaire associée ;
  • les problèmes de continence. Dans les tumeurs du bas rectum, notamment étendues au canal anal, des troubles fonctionnels avec apparition ou majoration d’une éventuelle incontinence anale peuvent être observés au cours des protocoles de radiothérapie étalés sur 5 semaines. Il faut bien- sûr le signaler à l’oncologue radiothérapeute.

Faut-il suivre un régime particulier pendant la radiothérapie ?

Pendant la radiothérapie, les antioxydants sont à éviter car il semblerait qu’ils diminuent l’efficacité de l’irradiation. Il vaut donc mieux éviter de boire du thé vert, d’utiliser du curcuma et de consommer des aliments riches en vitamine C (orange, kiwi, fraise, myrtille, prune, grenade…).

Des diarrhées sont les conséquences fréquentes d’une irradiation de l’abdomen ou du pelvis ou d’une chimiothérapie associée. Ces traitements provoquent en effet un dérèglement des fonctions de la digestion qui peut avoir des répercussions sur le poids.

Le patient doit se peser au moins 2 fois par semaine. Toute perte de poids supérieure à 3 ou 4 kilogrammes doit être signalée au médecin radiothérapeute.

Le risque majeur de la diarrhée étant la déshydratation, le patient doit boire beaucoup pour compenser les pertes en eau (en évitant le café fort et les boissons glacées). Les sodas dégazéifiés sont riches en potassium et donc conseillés en cas de diarrhée.

Voici quelques suggestions alimentaires en cas de diarrhée :

Aliments à éviter :

  • viandes grasses : porc, mouton, plats en sauce ;
  • charcuteries ;
  • poissons gras : saumon, maquereaux, sardines, poissons fumés ;
  • légumes riches en fibres : haricots verts, chou, épinards ;
  • légumineuses : lentilles, pois… ;
  • frites, chips ;
  • fruits crus ;
  • fruits secs : raisins, dattes ;
  • fruits oléagineux : noix, amandes, cacahuètes ;
  • piment ;
  • produits laitiers : éviter les plus riches en graisse.

Aliments conseillés :

  • viandes maigres : bœuf, veau, poulet sans peau, viandes et poissons grillés ou bouillis…
  • poissons maigres : merlu, dorade, crevettes…
  • purées de légumes, carottes, courgettes…
  • pâtes et riz blanc ;
  • fruits cuits épluchés, en salade ou compotes ;
  • aliments pauvres en matières grasses.

Dans tous les cas, des traitements médicamenteux peuvent être associés aux conseils diététiques.

Quelles nouvelles techniques de radiothérapie sont indiquées dans les cancers colorectaux ?

Au cours des dernières années, la radiothérapie a connu de nombreux progrès. Le volume d’irradiation est de mieux en mieux défini et les tissus sains avoisinants sont mieux préservés. Bénéficiant des progrès techniques, informatiques et de l’imagerie, les radiothérapeutes peuvent aujourd’hui proposer une radiothérapie sur mesure.

On est actuellement capable de fusionner les images du scanner et de l’IRM afin de mieux définir le volume à irradier.

La technique de référence est la radiothérapie conformationnelle en 3 dimensions qui tient compte de l’anatomie propre à chaque patient pour irradier au mieux la tumeur et épargner au maximum les tissus sains adjacents. Ce double objectif peut être encore mieux rempli en utilisant la radiothérapie conformationnelle avec modulation d’intensité ; grâce à ce procédé, la quantité de rayons délivrée est modulée à l’intérieur même des différents faisceaux d’irradiation, ce qui permet de littéralement «sculpter» les faisceaux pour les adapter à chaque patient. Cette technique est de plus en plus utilisée en pratique courante.

Les nouveaux appareils de radiothérapie sont également équipés d’un système d’imagerie embarquée qui permet de vérifier précisément avant la séance d’irradiation que la tumeur est bien traitée comme prévu.

Les nouveaux appareils de radiothérapie sont également équipés d’un système d’imagerie embarquée qui permet de vérifier précisément avant la séance d’irradiation que la tumeur est bien traitée comme prévu.

L’évaluation du traitement

Quels examens doivent être pratiqués pendant et après le traitement ? L’imagerie et les marqueurs.

Avant de décider du traitement, il est nécessaire d’effectuer un bilan, appelé bilan d’extension, pour vérifier l’existence ou non de métastase(s) afin d’adapter le traitement au cas particulier du patient. D’autres examens de surveillance sont ensuite réalisés pendant et après le traitement.

Le bilan d’extension comprend toujours un examen physique et un long interrogatoire à la recherche d’autres maladies et des antécédents familiaux, des examens sanguins et radiologiques. Il sera complété par un électrocardiogramme (ECG) ou par un examen cardiaque plus approfondi si nécessaire.

Les examens sanguins comportent :

  • la numération des cellules sanguines, permettant de s’assurer qu’il n’y a pas d’anémie (diminution du taux de globules rouges et de l’hémoglobine) et que les plaquettes ainsi que les globules blancs sont en quantité satisfaisante pour pratiquer une intervention chirurgicale et une éventuelle chimiothérapie ;
  • les tests de coagulation en vue de l’opération ;
  • des tests permettant de vérifier le fonctionnement du foie et des reins et de s’assurer qu’il n’y a pas de contre-indications, à l’anesthésie ou aux traitements ultérieurs ;
  • un dosage sanguin de l’antigène carcinoembryonnaire (ACE), substance chimique (appelée aussi marqueur tumoral) produite par les cellules du cancer colorectal. Cependant, il est important de savoir que même quelqu’un de bien portant n’a pas un marqueur nul et que ce test n’a pas de valeur de dépistage. Les normes dépendent des laboratoires, mais une valeur supérieure à la normale peut indiquer une tumeur étendue. Ce marqueur n’est cependant pas spécifique de ce cancer et son taux peut être élevé dans d’autres cancers comme dans des situations autres (maladies inflammatoires de l’intestin, tabagisme…).

Les examens radiologiques comportent au minimum une échographie abdominale et une radiographie du thorax, mais un scanner thoraco-abdomino-pelvien est très souvent demandé car il fournit des images plus précises ; en particulier quand le taux d’ACE est augmenté.

L’imagerie par résonance magnétique (IRM) du foie est un examen parfois utile si le scanner ne permet pas de caractériser certaines lésions, et nécessaire si une résection des métastases hépatiques est envisagée.

Dans le cas particulier du cancer du rectum, une IRM ou une échoendoscopie rectale (échographie avec une sonde placée dans le rectum) sont souvent nécessaires.

En cas de patients ayant une maladie métastatique traitée par chimiothérapie +/- thérapie ciblée ou immunothérapie, des scanners effectués tous les deux à trois mois permettront d’évaluer l’efficacité des traitements.

Quand le taux d’ACE reste augmenté après l’intervention (il doit normalement se normaliser après l’ablation de la tumeur), un PETscan peut être demandé à la recherche de maladies invisibles par les autres méthodes.

Passée la phase de traitement, ces examens sanguins et radiologiques sont répétés dans le cadre d’une surveillance à intervalles réguliers, au moins tous les 6 mois pendant 5 ans si la tumeur n’est pas trop étendue ; tous les 3 ou 4 mois dans les autres cas. À ces examens s’ajoute la coloscopie. Elle est réalisée 1 an après l’opération, puis tous les 3 à 5 ans en fonction de son résultat. La surveillance est adaptée et élargie aux organes pouvant être touchés en cas de cancer colorectal héréditaire.

Les patients doivent faire les examens de dépistage habituels des autres cancers, notamment la mammographie pour les seins.

 

Faut-il une surveillance pendant et après le traitement ?

Il faut bien sûr être suivi. Le suivi a un double but : dépister le plus tôt possible une récidive ou une métastase, même si leur fréquence est faible, pour pouvoir les traiter plus efficacement et prévenir ou dépister un autre cancer.

L’angoisse, si elle existe, est légitime au moment de faire un bilan. Mais il faut se rappeler que le bilan apporte seulement la connaissance de l’état de santé du patient. Il le soulage s’il est normal. Il ne faut pas anticiper de mauvais résultats et ne pas penser systématiquement à une récidive dès que l’intestin est examiné. Cette angoisse est inutile, même si elle est compréhensible.

La recherche d’une récidive est la suite habituelle de toute prise en charge. Même si des métastases du cancer colorectal sont découvertes, de plus en plus de patients peuvent en guérir grâce aux traitements. D’autres peuvent avoir une survie prolongée.

Le bilan de surveillance comprend toujours un examen clinique, des examens sanguins et radiologiques. Il doit à chaque fois que possible être mené en collaboration étroite avec le médecin traitant et les spécialistes.

La surveillance du côlon par coloscopie doit être répétée tous les 3 à 5 ans même si les coloscopies sont normales. En cas de polype(s) ou de terrain génétique prédisposant, la fréquence des coloscopies doit parfois être plus fréquente. Contrairement à certaines idées ou à d’autres cancers, le cancer colorectal guérit. Il y a très peu de rechutes après 5 ans.

Que signifient rémission, guérison et récidive ?

Il faut s’entendre sur les définitions pour éviter les faux espoirs et les faux désespoirs qui peuvent faire beaucoup de mal.

Si le bilan d’extension n’a pas révélé de métastases, si le patient a été opéré et que le chirurgien a enlevé toute la tumeur, qu’il y ait eu ou non une chimiothérapie sur une période de 3 ou 6 mois, le patient a de fortes probabilités d’être guéri. Ses chances de guérison dépendent du stade de son cancer : plus de 90 % si c’est un stade I, environ 80 à 85% si c’est un stade II, 70 à 80 % dans les stades III dans le cas où une chimiothérapie adjuvante a été réalisée. Malgré tout, même si elles sont rares, les récidives sont possibles et surviennent le plus souvent dans les 3 ans qui suivent le traitement. C’est pourquoi, le terme de « rémission complète » est utilisé dans un premier temps lorsque les bilans de surveillance restent normaux.

Quel que soit le stade de départ, s’il n’y a pas de récidive au bout de 3 ans, le patient a plus de 90 % de chances d’être guéri. Donc une rémission complète a toutes les chances d’être une guérison et le patient doit vivre normalement. Il est seulement un peu plus vulnérable.

La récidive, ou rechute, est dépistée lors des bilans de surveillance. C’est une très mauvaise nouvelle, difficile à vivre qui peut même parfois conduire à en vouloir à son chirurgien ou à son cancérologue. En fait, cette récidive est liée au fait que des cellules malignes avaient déjà, lors de l’opération, migré à distance mais qu’elles étaient invisibles. La chimiothérapie, si elle a eu lieu, n’a parfois pas réussi à les éradiquer. Elle a peut-être cependant retardé cette récidive, mais rien ne peut le prouver. La récidive peut parfois encore être guérie, même au stade de métastase. C’est pourquoi les bilans de surveillance sont si importants.

Enfin, d’emblée ou lors de la récidive, lorsque les métastases sont présentes et inopérables, même après avoir diminué de taille grâce à la chimiothérapie et aux thérapies ciblées, le traitement ne peut parfois pas guérir. Dans cette situation, quand la chimiothérapie fait diminuer la ou les métastases, il est question de réponse tumorale, ce qui est équivalent à une rémission. Cette réponse est complète si les métastases ne sont plus visibles et cette réponse est dite partielle si elles ont diminué en taille de plus de 30 %. Quand la tumeur ou les métastases augmentent à nouveau, soit parce qu’il y a un échappement au traitement, soit après une pause thérapeutique, il ne s’agit pas de récidive mais de progression puisque le fait qu’il reste de la tumeur était connu. Il est alors nécessaire de mettre en place un nouveau traitement, dit de seconde intention.

Nouveautés et avancées

De nouvelles techniques d’imagerie plus performantes arrivent et tentent de supplanter grâce à leur haute définition les techniques plus classiques qui ont fait leurs preuves.

Notamment le PET-scan (ou TEP, tomographie d’émission par positons) est une technique d’imagerie qui permet de détecter les positons, particules chargées positivement. Sa réalisation suppose l’injection dans les veines d’un patient à jeun d’une substance appelée 18 fluoro-deoxy-glucose ou 18-FDG. Il s’agit d’une sorte de sucre marqué par ces particules qui ne restent pas longtemps dans le corps (elles sont dites « à demi-vie courte ») dont la distribution au sein de l’organisme est visualisée par un scanner très performant. (Les cellules cancéreuses sont de plus grandes consommatrices de glucose que les cellules bénignes du corps, elles fixent donc plus précocement le sucre et en particulier celui-ci). Les patients ne doivent pas avoir de diabète ou de glycémie élevée ; ils doivent être complètement au repos musculaire depuis au moins 30 minutes avant que l’examen ne démarre.

L’examen dure en moyenne 2 heures. Des caméras tournent autour du patient allongé et enregistrent les rayonnements radioactifs émis par les cellules cancéreuses qui ont absorbé le sucre marqué par les particules radioactives. Ces rayonnements sont analysés. Les images obtenues permettent ainsi de localiser des cellules malignes dans l’organisme.

Cet examen est parfois indiqué avant une opération destinée à enlever des métastases.Il n’est pas obligatoire, il peut cependant être utile en cas de doute sur les autres examens d’imagerie. Il permet de s’assurer qu’il n’y a pas d’autres métastases qui n’auraient pas été détectées par le scanner ou l’IRM. Il est également indiqué devant une élévation inexpliquée de l’antigène carcino-embryonnaire (ACE) (marqueur tumoral).

Les échographies de contraste sont également en développement récent et permettent en caractérisant mieux la vascularisation des métastases hépatiques de mieux les détecter et de mieux évaluer l’efficacité des traitements.

Qu’est-ce que la thérapie anti-angiogénique ?

Pour se développer et devenir invasive, puis donner des métastases,
la tumeur a besoin de fabriquer des vaisseaux sanguins, c’est ce que
l’on appelle la néovascularisation ou angiogenèse tumorale.

Cette angiogenèse dépend de facteurs activateurs et de facteurs
inhibiteurs. Parmi les facteurs activateurs de l’angiogenèse, le VEGF
(Vascular Endothelial Growth Factor) est le plus important car
il stimule et recrute les cellules endothéliales qui vont former les
néovaisseaux indispensables à la croissance tumorale. Or le VEGF
est fabriqué directement par de nombreuses cellules tumorales, en
particulier celles du cancer colorectal.

Pour être actif, le VEGF se fixe sur un récepteur, le VEGFR, qui est
présent sur les cellules endothéliales. Cette fixation du VEGF sur
son récepteur active de petites molécules que l’on appelle les
tyrosines-kinases qui déclenchent une cascade de modifications
moléculaires aboutissant à la croissance et à la prolifération des
cellules endothéliales.

Il y a donc plusieurs moyens de bloquer l’angiogenèse : on peut
inhiber le VEGF dans la circulation sanguine, c’est ce que fait le
bevacizumab et d’une manière un peu différente l’aflibercept ; on
peut aussi bloquer le récepteur du VEGFR ou inhiber les tyrosines
kinases et la transmission du signal dans la cellule endothéliale.
Actuellement, le bevacizumab a fait la preuve de son efficacité en
première et seconde ligne thérapeutique et l’aflibercept en seconde
ligne thérapeutique dans le cancer colorectal métastatique; une
autre molécule, le régorafénib, est un inhibiteur de tyrosine-kinase
et peut être indiqué en cas de progression de la maladie avec les
autres traitements (chimiothérapies et thérapies ciblées).

Un autre médicament dirigé contre l’angiogenèse, le ramucirumab
a donné un essai positif mais n’a pas obtenu son remboursement
en France, malgré une autorisation de mise sur le marché (AMM) en
Europe. Il n’est donc pas disponible dans cette indication.

Quels progrès peut-on attendre en chirurgie ?

Les techniques chirurgicales concernant le cancer du côlon et du
rectum sont maintenant bien définies et ne devraient pas être
beaucoup modifiées dans les années à venir sauf pour les métastases. La voie d’abord coelioscopique peut être utilisée pour certains cancers du côlon et du rectum et les métastases hépatiques.
La chirurgie hépatique est en plein essor pour le traitement des
métastases. Elle est parfois possible, même si les métastases
sont nombreuses et mal placées dans le foie. De même les
techniques de destruction par la chaleur des métastases de moins
de 3 cm (radiofréquence et micro-ondes) sont utilisables par les
chirurgiens ou les radiologues (et alors sous échographie). Elles
sont en amélioration constante.

Aujourd’hui, près de 20% des patients ayant eu des métastases
inopérables peuvent être opérés grâce à la réduction de la ou
des métastases par la chimiothérapie et les thérapies ciblées.
Les métastases potentiellement opérables sont celles du foie, du
poumon, du péritoine, du cerveau et des os.
Dans l’avenir, les progrès les plus importants seront sans doute
liés non pas à l’opération en elle-même, mais à la prise en charge
post-opératoire immédiate. En effet, il se développe actuellement
des techniques de réhabilitation précoce qui permettent de se
rétablir plus rapidement de l’intervention chirurgicale grâce
à une meilleure prise en charge de la douleur post-opératoire
immédiate.

Ces techniques, qui reposent sur l’administration continue
d’antalgiques majeurs comme les morphiniques par voie
péridurale (comme pour un accouchement), permettent ainsi,
du fait de l’absence de douleur, de pouvoir se lever et de boire le
soir de l’intervention, de manger et d’être débarrassé de la sonde
urinaire, de la sonde gastrique et des perfusions le lendemain de
l’intervention. Ceci permet généralement une reprise plus rapide
du transit intestinal et une durée d’hospitalisation plus courte.
Ces techniques qui sont encore en cours d’évaluation dans les
centres spécialisés donnent des résultats prometteurs et seront
probablement plus largement diffusées dans un futur proche.

Quels progrès peut-on attendre en radiothérapie ?

Des études sont en cours pour essayer de ne pas opérer les patients
après une excellente réponse à la chimioradiothérapie pour un
cancer du rectum et dans des cas très sélectionnés (stratégie
« Watch and Wait »). Une voie de recherche est d’augmenter la
dose d’irradiation reçue par la tumeur, principalement par deux
techniques : la contactothérapie et la curiethérapie endocavitaire.
Des essais cliniques sont en cours pour évaluer cette stratégie.

Par ailleurs, la radiothérapie stéréotaxique se développe
rapidement. C’est une technique qui utilise de multiples minifaisceaux qui vont se croiser en un point précis, la tumeur. Elle
permet donc de délivrer une dose élevée dans un petit volume
mais la précision de ce traitement nécessite que le patient ne
bouge pas du tout pendant la séance. Il est possible ainsi de
délivrer des doses plus fortes en peu de séances, capables de
détruire complètement des tumeurs inaccessibles par d’autres
méthodes. Ainsi, elle peut être utilisée pour traiter des métastases
hépatiques, pulmonaires ou osseuses, voire même une rechute
locale. Associée à un traitement par immunothérapie, elle pourrait
avoir un effet à distance sur d’autres lésions tumorales (effet
abscopal). De nombreux essais sont en cours pour vérifier cette
hypothèse

Que peut-on attendre de l’enquête génétique et des examens qui sont en rapport avec la génétique de l’individu ou de la tumeur?

Près de 10 % des cancers colorectaux résultent d’une prédisposition
héréditaire.
L’intérêt d’identifier des altérations génétiques héritées permet
de faire des diagnostics précoces et de prédire le pronostic des
personnes appartenant à des familles atteintes de cancers à
caractère héréditaire. Il est ainsi possible de rassurer et de limiter les
coloscopies pour une personne qui n’a aucune altération génétique
bien qu’elle appartienne à une famille concernée. À l’opposé,
en cas de découverte du gène altéré, la personne doit avoir une
surveillance et un traitement préventif adapté.

Lorsque l’on a trouvé le gène muté chez un patient pris en charge
pour un cancer colorectal rentrant dans le cadre d’une maladie
héréditaire (polypose familiale, syndrome HNPCC ou autre syndrome plus rare), il suffit d’une prise de sang, pour déterminer si les sujets apparentés sont porteurs de la mutation ou non.
Il s’agit cependant de techniques complexes avec un délai de plusieurs mois pour avoir le résultat.

Rappelons les circonstances où la consultation génétique est nécessaire :

  • la polypose familiale pour recherche du gène APC ;
  • le cancer colique héréditaire sans polypose (HNPCC ou Hereditary Non Polyposis Colorectal Cancer ou syndrome de Lynch) pour recherche des gènes codant pour les protéines hMLH1 et hMSH2 ou plus rarement MSH6 et PMS2 ;
  • la polypose atténuée MUTYH pour recherche de mutation du gène MUTYH ;
  • tous les cancers non familiaux atteignant les gens jeunes (moins de 50 ans) pour rechercher une instabilité des microsatellites ou MSI.

Au-delà des cancers héréditaires, la recherche génétique et moléculaire vise à déterminer les facteurs de risque et de pronostic ainsi qu’à prédire les résultats thérapeutiques : c’est ce que l’on appelle la pharmacogénétique et la pharmacogénomique.

La recherche des facteurs de risque de cancer colorectal est essentielle pour la prévention. Elle étudie les gènes de prédisposition préalablement abordés. La recherche de facteurs pronostiques vise à identifier les patients à risque de rechute ou de cancers à forte agressivité.

A terme, les patients seront mieux traités et beaucoup éviteront une difficile chimiothérapie inutile. Les patients pourront également être mieux traités grâce à la pharmacogénétique qui étudie les gènes intervenant dans le métabolisme des médicaments. On peut déjà ainsi déterminer les risques de toxicité des médicaments utilisés en chimiothérapie du cancer colorectal. La variation inter-individuelle de ces gènes est appelée polymorphisme génétique. La pharmacogénomique étudie les gènes tumoraux qui peuvent servir de cible et prédire les résultats thérapeutiques. De même, des études du système immunitaire ou des profils des gènes à partir des techniques de puces à ADN sont en cours avec des résultats encourageants.

 

Quelle stratégie globale de prise en charge thérapeutique des cancers du rectum ?

La prise en charge des patients avec un cancer du rectum localement avancé a reposé pendant des années sur la radiothérapie préopératoire et une chirurgie consistant à retirer le rectum, siège de la tumeur, avec exérèse complète du mésorectum. Cette stratégie permet de réduire le risque de récidive locale. Cependant, le risque de récidive métastatique à distance, de l’ordre de 30%, n’avait pas été réduit jusqu’à présent.

Ces dernières années, plusieurs essais thérapeutiques ont évalué l’intérêt avant la chirurgie (traitement néo-adjuvant) d’une chimiothérapie, administrée en induction (avant radiothérapie) ou en consolidation (après radiothérapie ou chimioradiothérapie). Deux essais de phase 3, PRODIGE 23 et RAPIDO, dont les résultats ont été rapportés en 2020, ont montré que l’ajout d’une chimiothérapie à la chimioradiothérapie pré-opératoire permettait de diminuer le risque de survenue de métastases de manière significative. Les deux schémas évalués dans ces essais sont très différents. Dans l’étude PRODIGE 23, les patients recevaient une chimiothérapie d’induction par FOLFIRINOX (6 cycles) avant chimioradiothérapie préopératoire et chirurgie puis 3 mois de chimiothérapie adjuvante alors que dans l’étude RAPIDO, ils recevaient une radiothérapie courte de 5 séances suivie d’une chimiothérapie de consolidation par CAPOX (6 cycles) ou FOLFOX (9 cycles) avant chirurgie. L’indication de l’un ou l’autre schéma thérapeutique est discuté par vos médecins en réunion de concertation pluridisciplinaire selon les caractéristiques des patients (âge, comorbidités).

Les développements actuels portent également pour beaucoup sur une désescalade thérapeutique et sur un traitement à la carte tenant compte des caractéristiques de chaque patient et de l’évaluation initiale par la clinique et les examens d’imageries.

Dans certains cas, en cas de bonne réponse au traitement par chimiothérapie ± chimioradiothérapie, la conservation d’organe (c’est-à-dire sans chirurgie d’exérèse du rectum) selon une stratégie de « Watch and Wait » qui signifie « regarder/surveiller et attendre » avec parfois résection locale de la cicatrice peut être envisagée surtout dans les cancers de petites tailles et de bon pronostic.

Qu’est-ce-que l’ADN tumoral circulant et à quoi sert-il ?

Nos cellules peuvent relarguer dans la circulation sanguine des fragments de leur matériel génétique aussi appelé ADN (acide desoxy-ribonucleique). Ce phénomène arrive le plus souvent lors de la mort cellulaire par des phénomènes appelés nécrose ou apoptose mais peut aussi exister à partir de cellules vivantes.

Lorsque l’organisme contient des cellules cancéreuses, ces cellules peuvent aussi relarguer de l’ADN dans la circulation sanguine. Les cellules cancéreuses n’étant pas normales génétiquement il est possible de détecter spécifiquement l’ADN qu’elles relarguent par la recherche de mutations ou de méthylations qui n’existent pas dans l’ADN normal. Les nouvelles technologies de biologie moléculaire permettent ainsi de repérer dans le sang un brin d’ADN tumoral anormal noyé dans 200 000 brins d’ADN normal.

Ainsi lorsqu’on trouve de l’ADN tumoral circulant grâce à ces techniques (appelées aussi biopsie liquide) cela traduit la très probable présence de cellules cancéreuses au sein de l’organisme. Les exploitations faites de cette découverte d’ADN tumoral circulant peuvent servir à rechercher une maladie minimale résiduelle, non visible sur les examens morphologiques comme le scanner ou l’I.R.M.

Elle peut aussi permettre d’évaluer le statut moléculaire d’une tumeur difficile à biopsier par des analyses faite sur le sang à partir de cet ADN tumoral circulant, comme la recherche de mutations spécifiques dans les gènes RAS et BRAF évoqués précédemment dans ce guide.

Elle peut enfin servir à suivre les patients et rechercher l’apparition de mutations qui n’existaient pas au départ mais qui se développent sous traitement et constituent un mécanisme de résistance à certaines thérapies ciblées comme les anticorps antiEGFR par exemple. . L’ADN tumoral circulant est aujourd’hui essentiellement utilisé dans des protocoles de recherche clinique ou translationnelle. Cependant son utilité pour rechercher des mutations chez un patient difficile à biopsier sur ses lésions tumorales fait qu’elle est déjà pratiquée en routine dans certains centres.

Plusieurs essais thérapeutiques sont en cours en France et dans le monde actuellement pour évaluer son intérêt pour décider d’une chimiothérapie complémentaire à la chirurgie chez des patients n’ayant pas de métastases détectables après la chirurgie de leur cancer primitif. Ainsi l’ADN tumoral circulant pourrait devenir un formidable outil dans la pratique clinique au cours des prochaines années même si aujourd’hui ses principales utilisations se font dans le cadre de la recherche.

La recherche clinique

Qu’est-ce qu’un essai clinique ?

Un essai clinique est une recherche faite avec la participation des patients. C’est un essai thérapeutique lorsqu’il concerne un traitement. La recherche clinique est essentielle à l’amélioration des traitements. Elle a permis de faire progresser de façon notable les traitements standards de chimiothérapie, de thérapies ciblées et d’immunothérapie.

De toute évidence, les patients qui sont inclus dans ces essais thérapeutiques peuvent ainsi avoir accès à des nouveaux médicaments ou à des stratégies thérapeutiques innovantes.

Voici en quelques mots les méthodes suivies pour améliorer les traitements :

  • une fois qu’une molécule prometteuse a été identifiée par un laboratoire et que les études précliniques ont été réalisées (expérimentations réalisées avant l’utilisation de la molécule chez l’homme), les essais thérapeutiques de la phase I peuvent commencer. Le but de ces essais est de déterminer les doses tolérées et les effets secondaires et parfois d’apprécier l’efficacité des traitements testés ;
  • la phase II, qui suit, cherche à vérifier si le traitement est actif. Cette phase vise à apprécier les réponses tumorales et à analyser les effets secondaires ;
  • la phase III est une étape importante. Quand un traitement actif a été identifié, il faut le comparer aux traitements antérieurs et voir s’il leur est supérieur (ou parfois s’il a moins de toxicités). Cette étude demande un nombre beaucoup plus grand de patients (plusieurs centaines) et fait l’objet d’une randomisation, c’est-à-dire d’une sorte de tirage au sort élaboré. Ni le patient ni le médecin n’ont le choix du traitement entre l’ancien, correspondant au traitement standard actuel, et le nouveau.

Les essais thérapeutiques font l’objet d’une réglementation particulière. Ils sont approuvés par un comité de protection des personnes (CPP), déclarés aux autorités françaises et européennes compétentes et soumis à des règles appelées bonnes pratiques cliniques (BPC). Le patient reçoit une notice d’information et signe avec son médecin un formulaire de consentement éclairé avant d’entrer dans l’étude. Sa participation est donc totalement volontaire et il peut sortir de l’étude à tout moment s’il le désire.

 

Quels sont les essais cliniques en cours ?

La recherche clinique vise à découvrir les moyens d’améliorer la prise en charge des cancers, notamment par le biais d’essais cliniques, en particulier de phase précoce. Depuis plusieurs années des essais thérapeutiques de phase III, nationaux ou internationaux se déroulent en France.

On distingue les essais adjuvants qui visent à diminuer les rechutes dans les cancers colorectaux de stade II et surtout III. Ils visent à évaluer de nouveaux médicaments ou à améliorer les indications et la tolérance des traitements actuels. Il existe surtout des essais thérapeutiques de phase I, II et III pour les cancers plus avancés. Ils concernent, d’une part, de nouvelles associations, en particulier la chimiothérapie avec une ou plusieurs thérapeutiques moléculaires ciblées ou de l’immunothérapie et, d’autre part, des stratégies thérapeutiques incluant des pauses thérapeutiques ou des traitements d’entretien.

Il est impossible de récapituler ici tous les essais thérapeutiques en cours. Ces renseignements se trouvent sur les sites internet de l’Institut National du Cancer (INCa) ou des groupes coopérateurs (FFCD, GERCOR, UNICANCER) composant le groupe PRODIGE. La médecine personnalisée est au cœur de l’innovation en matière de diagnostic, de pronostic et de traitement. A l’heure du développement de la médecine personnalisée en cancérologie, la nature et l’ordre des gènes qui composent l’ADN des patients (génome) peuvent être analysés pour déterminer le risque de développer certaines maladies, adapter les traitements en fonction du patient et anticiper ses réactions face aux médicaments administrés.

Des médicaments nouveaux comme les thérapies ciblées, l’immunothérapie et de nouveaux antimétabolites ont déjà démontré des résultats positifs. Certains sont en attente d’Autorisation de Mise sur le Marché (AMM).

D’autres approches sont en cours ; elles s’adressent à des populations définies par un biomarqueur ou elles sont dirigées sur le système immunitaire.

Chaque patient doit s’informer et ne pas avoir peur. Car il a de bonnes chances de bénéficier de ces essais thérapeutiques. Il ne faut pas oublier que les progrès sont déjà là. En 15 ans, la survie à 5 ans des patients atteints de cancers de stade III est passée de 50 % à 80 % grâce au progrès de la prise en charge multidisciplinaire des patients. La durée de survie des patients avec cancers colorectaux métastasés a plus que triplé en 20 ans.

La recherche : exemples de projets soutenus