Le diagnostic du cancer du foie

Quels sont les symptômes du cancer du foie ?

Le cancer du foie est un cancer asymptomatique dans l’immense majorité des cas. Le foie est un organe dont la seule partie innervée est la capsule périphérique. Il faut donc que la tumeur atteigne la capsule ou la distende pour entraîner des douleurs.

Le diagnostic de tumeur dans le foie est donc le plus souvent fait lors d’un examen radiologique réalisé pour une autre raison comme un ballonnement, une pesanteur abdominale, ou lors de la découverte d’une anomalie du bilan hépatique à la prise de sang.

Le cancer du foie survenant dans 90% des cas sur une maladie chronique du foie, celle-ci peut se manifester par des symptômes comme la jaunisse (ictère), la fatigue (asthénie), ou la présence de liquide dans le ventre (ascite). Ces symptômes de la cirrhose peuvent faire découvrir le cancer du foie lors de la réalisation d’une échographie ou d’un scanner.

Sur une prise de sang, il n’y a pas d’élément qui permette d’affirmer la présence d’un cancer du foie. Toutefois, une anomalie des tests hépatiques comme les transaminases (ASAT et ALAT) ou la cholestase (GGT, PAL), peuvent orienter vers une maladie du foie.
Il faut alors réaliser des tests pour les hépatites virales b et C et une
échographie abdominale. Le seul marqueur du cancer du foie, est l’alpha-fœtoprotéine ou AFP. Ce marqueur n’est cependant élevé que dans 40% des cas de cancer du foie (mauvaise sensibilité) et peut être élevé dans d’autres situations (mauvaise spécificité).

Quel est l’intérêt d’une détection précoce du cancer du foie ?

L’objectif de l‘imagerie est de détecter le plus tôt possible les nodules de cancer du foie (ChC), afin de mettre en route le plus rapidement possible un traitement curatif.

Comme le ChC survient essentiellement sur foie cirrhotique, dépister le ChC c’est d’abord dépister la cirrhose hépatique.

Le premier enjeu est donc de rappeler ici toute l’importance d’une surveillance régulière des patients dits « à risque » par des examens d’imagerie simples tels que l’échographie hépatique.

Qui, comment et à quelle fréquence détecter ?

Chez les patients exposés au risque de carcinome hépatocellullaire (voir question « Quels sont les principaux facteurs de risque ? »), l’examen de détection de référence du ChC sur foie cirrhotique est l’échographie du foie.

Cette surveillance indispensable doit être réalisée tous les 6 mois.

Cette étape de détection est fondamentale. Pour autant, tous les nodules détectés en échographie ne sont pas des cancers, la cirrhose étant à l’origine de la formation de nodules parfois bénins :

  • comme les « nodules de régénération » par exemple.

Dès lors qu’un nodule aura été identifié chez un patient à risque, ce sont d’autres techniques d’imagerie qu’il faut mettre en œuvre pour savoir s’il s’agit d’un cancer ou non.

 

Quels examens d’imagerie permettent la caractérisation de nodule de cancer primitif du foie ?

Il existe trois grands types d’examens d’imagerie permettant de mieux caractériser des nodules une fois qu’ils ont été détectés en échographie. Il s’agit de l’échographie couplée à l’injection d’un produit de contraste ultrasonore, du scanner hépatique et de l’Irm du foie.

1- Echographie avec injection de produit de contraste

L’échographie est ici combinée à l’utilisation d’un agent de contraste. Il s’agit d’un produit injecté par voie intraveineuse qui va ensuite être détecté pour permettre de mieux comprendre la vascularisation des nodules détectés en échographie. un nodule cancéreux se traduit par une surabondance d’artères qu’il est possible d’identifier avec l’injection de ce produit de contraste. C’est ce signe que recherche le radiologue dans le cadre de l’échographie avec injection de produit de contraste. Cet examen présente peu de contre-indications essentiellement liées à une allergie éventuelle   à ce produit, à des maladies pulmonaires sévères incluant des détresses respiratoires, des hypertensions artérielles pulmonaires, ou des malformations cardiaques sévères.

2- Scanner hépatique

Le scanner est une technique radiologique utilisant les rayons X. Afin de caractériser les nodules cancéreux dans le foie, l’injection d’un produit de contraste est là encore nécessaire. Ces produits de contraste sont des dérivés de molécules d’iode.

Les contre-indications à la réalisation de l’examen sont :

  • celles de l’utilisation des rayons X, notamment la grossesse pour
    laquelle une exposition aux rayonnements X peut être délétère
    pour le foetus ;
  • celles liées à l’emploi des produits de contraste iodés telles qu’une
    allergie sévère documentée à un produit de contraste iodé ;
  • celles liées à une dysfonction rénale.

L’examen du foie va là encore apprécier la quantité d’artères présentes dans les nodules de cancer du foie, permettant de les distinguer des nodules bénins. Sa durée est d’environ 5 à 10 minutes.

3- IRM hépatique

Le 3ème examen permettant de diagnostiquer le cancer du foie est l’Irm. Cet examen n’utilise pas de rayonnement ionisant. Il est basé sur l’exploitation de phénomènes magnétiques permettant de distinguer les tissus par leur composition en eau. Il permet également une parfaite identification de la vascularisation des lésions. Comme pour le scanner, l’utilisation de produit de contraste est nécessaire. Ces produits de contraste sont des molécules de Chélates de Gadolinium, injectées par voie intraveineuse.

Les contre-indications sont la présence de corps étranger métallique ou de prothèse magnétique au sein du corps, ou bien d’allergie aux produits de contraste gadolinés. Dans tous les cas, le médecin interroge le patient sur la présence de ces facteurs de risque contre indiquant l’Irm.

L’Irm est un examen nécessitant environ 25 à 30 minutes d’acquisition. Plusieurs « séquences » sont acquises, chacune permettant de bien étudier les caractéristiques tissulaires des différents nodules qui composent le foie. L’injection intraveineuse de produit de contraste permet là encore de bien identifier la quantité d’artères présentes dans les nodules.

4- Parmi tous ces examens, lesquels privilégier ?

Le médecin est le mieux à même d’identifier les différents examens qui sont tous indiqués selon le guide du bon usage des examens d’imagerie réalisé sous l’égide de la haute Autorité de Santé (hAS) par la Société Française de radiologie, la Société Française de médecine Nucléaire ainsi que les collèges de spécialités. Il est donc difficile d’indiquer un ordre de priorité.

L’échographie avec injection de produit de contraste permet généralement la caractérisation d’un nodule, mais peut être limitée
pour identifier plusieurs nodules dans le foie.

Le scanner peut être difficile à réaliser en fonction de l’existence d’une anomalie de fonctionnement des reins qui gênerait l’élimination du produit de contraste iodé une fois injecté.

L’Irm est bruyante et peut être difficile à réaliser notamment si le patient est claustrophobe ou qu’il présente des difficultés à tenir des apnées de l’ordre de 10 à 15 secondes.

Au vu des données actuelles de la littérature, les meilleures performances diagnostiques sont obtenues avec l’Irm, mais le scanner et l’Irm sont tous deux intégrés dans tous les arbres décisionnels permettant la caractérisation d’un cancer du foie.

Ainsi, les sociétés savantes européennes, nord-américaines et asiatiques proposent toutes d’utiliser le scanner ou l’Irm pour bien caractériser les nodules du foie détectés par échographie.

Quels résultats attendre des examens d’imagerie ?

Au terme des examens d’imagerie, les nodules identifiés peuvent avoir un aspect caractéristique de cancer du foie, ou bien au contraire, être typiquement bénins. Par ailleurs, les examens d’imagerie permettront de détecter la présence éventuelle d’anomalies à distance du foie. Cependant, dans environ un tiers des cas, malgré la qualité des examens d’imagerie réalisés, un diagnostic formel de cancer primitif du foie ne pourra pas être
réalisé sur les données de l’imagerie seules.

Pourquoi le médecin a-t-il demandé un examen de TEP scanner ?

Les examens de médecine nucléaire de type TEP scanner ne sont pas indiqués en première intention pour la détection et la caractérisation des cancers primitifs du foie. Cependant, ces examens peuvent être très importants lorsque les examens d’imagerie n’ont pas permis de diagnostiquer des nodules suspects (ou bien avant la mise en route de certains traitements) car les examens de TEP scanner peuvent permettre d’identifier des anomalies à distance du foie. Le TEP scanner est un examen utilisant des rayonnements ionisants et nécessitant l’injection d’un traceur radioactif (sucre radioactif marqué au fluor 18: le fluorodésoxyglucose). Ce traceur radioactif se fixe sur les zones tumorales, car la consommation de sucre des tumeurs est supérieure à celle des organes adjacents.

Il est ainsi possible de détecter dans le foie des zones nodulaires qui
surconsomment du glucose, qui sont généralement associées à des
zones tumorales.
Le traceur radioactif est ensuite éliminé rapidement dans les urines.
Le temps d’acquisition des examens TEP scanner est d’environ 1 heure : il sera donc demandé au patient de venir à jeun, de bien équilibrer sa glycémie s’il est diabétique et de rester immobile pendant environ 1 heure avant l’acquisition des images.

Qu’est-ce qu’une biopsie dirigée du foie ?

Dans certaines circonstances, un diagnostic de cancer primitif du foie ne peut pas être formellement réalisé par l’imagerie.

Dans ce cas, le médecin, avant de débuter des traitements spécifiques, peut être amené à proposer une biopsie du foie.

La biopsie du foie a pour objectif de prélever des cellules au sein des nodules les plus anormaux afin de permettre leur analyse en microscopie. Ces techniques sont aujourd’hui celles qui permettent de manière formelle l’identification de cellules cancéreuses, et plus encore, leurs caractérisations dans leur expression de différentes molécules, voire en analyse de leurs gènes. Ces éléments sont  maintenant très importants pour choisir le traitement le plus adapté de certaines formes de cancer.

La biopsie n’est pas toujours indispensable et si les données de l’imagerie sont typiques, le médecin pourra adresser le patient à un centre de référence qui jugera de la nécessité ou non de réaliser cette biopsie.

Comment se déroule la biopsie ? La biopsie est réalisée par un radiologue qui va, sous le guidage de l’échographie, identifier le nodule suspect. Après une anesthésie locale, le médecin introduit une aiguille au contact du nodule et réalise un ou généralement plusieurs prélèvements au sein du nodule et en dehors du nodule. Ces prélèvements sont ensuite adressés à un médecin anatomo pathologiste pour analyse.

Quels sont les risques de la biopsie ? Les risques de la biopsie sont généralement faibles. Ils incluent cependant un risque de saignement puisque l’aiguille va devoir franchir la périphérie du foie (la capsule) qui est richement vascularisée, d’une part, et d’autre part, va prélever un morceau de tissu intra-hépatique. Il sera donc demandé au patient de rester quelques heures en observation après le geste de la biopsie afin de vérifier qu’aucun saignement ne s’est produit. Au cas où un saignement se produit, il peut être décidé d’aller boucher les artères qui se seraient mises à saigner.

Avant la biopsie, il est demandé au patient de bien indiquer au médecin la prise de médicaments fluidifiant le sang (médicaments anti-coagulants, Aspirine, Plavix). Il peut être nécessaire d’arrêter certains de ces médicaments afin de minimiser le risque de saignement.

Les autres grandes complications seront présentées lors de la consultation avant la biopsie.

Quel bilan faut-il réaliser en cas de cancer du foie ?

Le cancer du foie survenant dans la majorité des cas sur une maladie chronique du foie, il est indispensable de faire le bilan du cancer mais aussi de la maladie chronique hépatique.

Bilan du cancer du foie

Ce bilan comporte principalement un examen d’imagerie tel qu’un scanner hépatique et des poumons afin de décrire la taille du cancer, son extension aux veines hépatiques, aux ganglions, à l’os et aux poumons. Si le scanner hépatique ne retrouve pas les caractéristiques typiques du cancer du foie, cet examen peut être complété par une Irm du foie. La prise de sang permet le dosage du marqueur tumoral (l’alpha fœtoprotéine) qui s’il est élevé, permettra de suivre l’effet du traitement du cancer.

La scintigraphie osseuse, le TEP scanner ou le scanner du cerveau ne sont pas systématiques.

Bilan de la maladie chronique du foie

Lors de la découverte d’un cancer du foie, il convient de rechercher une cause de maladie du foie avec une évaluation de la consommation d’alcool (actuelle et passée), la présence d’une infection chronique par le virus de l’hépatite b ou C (prise de sang), la présence d’un syndrome métabolique (associant hypertension artérielle, excès de cholestérol ou de sucre et surcharge pondérale), la présence d’une surcharge en fer ou une maladie hépatique plus rare.

Il faut aussi évaluer la gravité de la maladie hépatique en évaluant des données cliniques telles que la présence d’ascite (liquide dans le ventre) ou d’encéphalopathie (trouble neurologique induit par la cirrhose) ; et des données biologiques comme le taux d’albumine, de bilirubine totale, de créatinine et le taux de prothrombine. Ces données permettent de calculer les scores de Child-Pugh et de mELD.

Enfin, il faut évaluer la présence d’autres complications de la cirrhose,
comme la présence de varices dans l’œsophage ou l’estomac par la
réalisation d’une endoscopie digestive.

Bilan général
Dans toute situation médicale, l’évaluation des maladies associées est déterminante pour les propositions de traitement. De même, l’évaluation de l’état de santé général du patient est essentielle. Cette évaluation est faite d’après l’indice de performance ECOG OmS.

Quels sont les différents stades de la maladie ?

À la différence de beaucoup de cancers, le cancer du foie n’est pas classé selon la classification TNm, mais est classé selon un algorithme de traitement en 5 stades (bCLC). Cet algorithme prend en compte l’état général du malade selon la classification de l’OmS, l’état de la cirrhose selon la classification de Child-Pugh et le nombre et la taille des tumeurs.

  • BCLC0 ou stade très précoce : 1 tumeur de moins de 2 cm chez un patient avec cirrhose de Child A en excellent état général (OmS=0) ;
  • BCLC A ou stade précoce : 1 tumeur de moins de 5 cm ou moins de 3 à 5 tumeurs de moins de 3 cm chez un patient avec cirrhose de Child A ou b, en excellent état général (OmS=0) ;
  • BCLC B ou stade intermédiaire : plus de 3 à 5 tumeurs, quelle que
    soit leur taille, disséminées dans l’ensemble du foie chez un patient avec cirrhose de Child A ou b, en excellent état général (OmS=0) ;
  • BCLC C ou stade avancé : tumeur envahissant les gros vaisseaux
    intra-hépatiques ou avec extension en dehors du foie (métastase),
    chez un patient avec cirrhose de Child A ou b, en état général bon
    ou moyen (OmS= 1 ou 2) ;
  • – BCLC D ou stade très avancé : quelle que soit la taille et le nombre de tumeurs, chez un patient avec cirrhose décompensée de Child C et/ou en mauvais état général (OmS >2).

Quels sont les facteurs pronostics importants ?

Les facteurs pronostics du cancer du foie sont liés aux caractéristiques tumorales :

  • nombre de tumeurs ;
  • taille des tumeurs ;
  • extension de la tumeur aux vaiseaux intra-hépatiques ;
  • extension aux autres organes (métastases).

Le taux de marqueur tumoral est un marqueur pronostic (taux d’alpha fœtoprotéine) avec une valeur seuil qui varie selon les études mais qui est souvent de 1000 ng/ml.

Si une biopsie de la tumeur a été réalisée, le degré de différenciation de la tumeur est un facteur pronostic (bon, moyennement ou mal différencié selon la classification de l’OmS).

En dehors de ces facteurs liés à la tumeur, l’état général du patient et le stade de la cirrhose sont des facteurs pronostics très importants. Il faut cependant retenir que ces facteurs pronostics ne sont pas prédictifs de la réponse ou de la non-réponse au traitement.

Quels scores pronostics faut-il utiliser et quelle est leur application ?

De nombreux scores pronostics ont été décrit dans la littérature.
Cependant, aucun n’est utilisé en pratique courante pour décider d’un début ou d’un arrêt de traitement.

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